Écrit par Eric Déguillaume
Dimanche, 12 Juin 2011

Entre 1764 et 1767, une centaine d’habitants d’une lointaine province du Massif central, le Gévaudan, périssent sous les crocs d’un ou plusieurs animaux, la « Bête ». Aujourd’hui emblématique de sa région, la Bête du Gévaudan n’en finit pas de susciter interrogations et débats sur sa nature, souvent présentée comme mystérieuse. Pour ma part, elle fait l’objet d’un intérêt soutenu depuis 2001, auquel est venu se greffer, par la suite, l’application de la démarche zététique. Cet article, qui ne prétend pas apporter de réponse ferme ou d’élément nouveau, est plutôt un état des lieux, très général, sur la littérature consacrée à la Bête.

C’est aussi un exposé du parcours qui a été le mien sur ce cas, et du cheminement qui a mené à mon opinion actuelle sur la question. Ce parcours n’est pas clos, et sa conclusion ne l’est donc pas non plus. En cela, j’espère suivre l’ouverture et la prudence méthodologique qui caractérisent la démarche zététique. En ce sens, ce résumé de dix ans de recherches personnelles sur la Bête du Gévaudan se veut un exemple des remises en question que peuvent susciter les outils mis à notre disposition par la zététique.

Avant d’en venir au fait, quelques précisions géographiques s’imposent. Le Gévaudan du XVIIIème siècle correspond, à peu de choses près, à l’actuel département de la Lozère. À l’époque, il s’agit du diocèse de Mende. L’Église et l’État ne sont pas séparés, et l’évêque de Mende étant aussi comte du Gévaudan, les deux termes « Gévaudan » et « diocèse de Mende » désignent la même aire et sont interchangeables. L’affaire se déroulera principalement dans la moitié nord du Gévaudan, d’où son nom, mais s’étendra aussi sur les départements voisins (zone en orange sur la carte). Toutefois, la majorité des agressions aura lieu dans une zone beaucoup plus restreinte (en rouge sur la carte), en particulier à partir de mai 1765.

L’idée qu’un animal ait pu provoquer la mort de dizaines de personnes pendant trois ans au cœur de la France paraît suffisamment surprenante au citadin d’aujourd’hui pour qu’un rappel des faits – et de tout ce qu’ils comportent d’apparemment énigmatique – soit nécessaire. Un retour sur l’historiographie de la Bête permettra ensuite de mettre en perspective l’hypothèse de Michel Louis, que j’ai fait mienne pendant des années : celle d’un animal dressé à tuer par une main criminelle.

C’est là que la démarche zététique entre en jeu, par le biais du rasoir d’Occam. Son utilisation me conduisit, à l’aune d’éléments nouveaux portés à ma connaissance, à remettre en cause mon opinion : la mort d’un jeune Canadien tué par des loups en 2005, Kenton Carnegie, puis la lecture d’études scientifiques remettant en question l’innocuité du loup, me conduisirent à me rapprocher de l’idée, défendue par Jean-Marc Moriceau, que le loup seul suffit à rendre compte des ravages de la Bête du Gévaudan, sans devoir faire appel à une intervention humaine.

L’affaire du Gévaudan n’est toutefois pas si simple, et le tri à faire dans la documentation dont nous disposons est considérable. Je ne suis, personnellement, pas encore assez avancé dans l’examen du dossier pour me hasarder à formuler une conclusion ferme. Cette suspension de jugement (que je qualifierais ici de « raisonnée ») fait aussi partie intégrante de la zététique.

Rappel des faits

Le 1er juillet 1764, le curé de la paroisse de Saint-Étienne-de-Lugdarès, aux confins sud-ouest de ce qui est aujourd’hui le département de l’Ardèche, procède à la mise en sépulture de Jeanne Boulet, une adolescente de 13 ans demeurant au hameau des Hubacs. Dure banalité d’une époque où un enfant sur deux mourait avant l’âge adulte. Mais à y regarder de plus près, l’acte renferme une mention qui interpelle même le généalogiste averti, habitué à éplucher ce genre de document. L’officiant consigne en effet dans son registre que Jeanne Boulet a été enterrée « sans sacrements, ayant été tuée par la bête féroce ». L’animal qui allait terroriser la région pendant trois ans sous le nom de « Bête du Gévaudan » fait là sa première apparition dans une source écrite.

La formulation employée par le prélat laisse à penser que « la bête féroce » était déjà connue dans les environs. Cela sera confirmé par des récits a posteriori lorsque l’affaire commencera à prendre de l’ampleur à la fin de l’été : la Bête a vraisemblablement débuté sa prédation sur les humains au printemps 1764, bien que les circonstances et les victimes de ces premières attaques nous demeurent pratiquement inconnues faute de sources directes. Toujours est-il qu’en septembre, on n’en est plus là : une demi-douzaine de personnes a déjà péri sous les crocs de l’animal autour de la forêt de Mercoire, une zone escarpée qui marque la frontière entre le Vivarais et le Gévaudan. Après l’insuccès des premières chasses, face à cette situation, les autorités locales obtiennent le concours de l’armée royale, qui met à disposition un détachement de dragons[1] aux ordres du capitaine Duhamel.

Les battues de paysans encadrées par les soldats ne vont rien donner et, dès octobre 1764, la Bête va déplacer graduellement son champ d’action vers l’ouest, s’enfonçant en Gévaudan, où elle sème bientôt la terreur. Non content de s’étendre géographiquement, le carnage s’amplifie : tout au long de l’automne, puis de l’hiver 1764-65, les attaques se multiplient et la liste des morts s’allonge. On signale la Bête dans le l’Aubrac et le Rouergue (Aveyron actuel), en Auvergne (département du Cantal) et dans le Velay (la Haute-Loire, aujourd’hui). Une véritable psychose s’empare de la population locale, pour qui la Bête serait douée d’ubiquité ; apparemment plus pragmatiques, les fonctionnaires du roi supposent que plusieurs loups anthropophages opèrent de concert, et augmentent les récompenses habituellement offertes pour la destruction des loups.

Mais les habitants, eux, ne partagent pas tous cette opinion, et d’autres éléments nourrissent leur crainte à l’égard d’un animal qu’on dit invulnérable (des chasseurs l’ont vue se relever, apparemment sans mal, après l’avoir tirée), d’une audace et d’une familiarité sans limite, voire même particulièrement cruelle (certaines victimes sont retrouvées décapitées). Dans des campagnes encore marquées par les superstitions, le spectre d’un loup-garou ou autre créature surnaturelle ne tarde pas à être brandi. L’évêque de Mende, qui décrit dans un mandement à ses paroissiens la Bête comme un fléau divin venu les punir de leurs péchés, alimente la psychose. Tout comme la presse naissante, diffusée par le biais des colporteurs, souvent lue en public par la minorité de personnes sachant lire, et qui multiplie les récits fantaisistes, qu’ils soient imaginaires ou déformés.

L’affaire prend ainsi de l’ampleur pendant que les dragons sont impuissants. Elle remonte jusqu’aux oreilles du roi Louis XV, qui cède aux suppliques des autorités locales en envoyant sur place le louvetier[2] le plus réputé du royaume, le Normand Denneval (ou d’Enneval). Celui-ci n’aura pas davantage de succès, si bien que le souverain doit dépêcher en Gévaudan son propre porte-arquebuse[3], François Antoine, dit Antoine de Beauterne. Alors que de nombreux loups sont tués, et au moins deux d’entre eux identifiés comme anthropophages, rien ne semble pouvoir arrêter la Bête du Gévaudan – la seule nouveauté concerne son aire de prédation, qui se restreint désormais aux monts de la Margeride. Jusqu’à ce que le 19 septembre 1765, Antoine et sa suite abattent un grand loup qu’ils tiennent pour la Bête, et de fait, les attaques cessent. L’envoyé du roi rentre triomphalement à Versailles, et l’affaire est enterrée…

… Jusqu’à ce qu’en décembre 1765, tout recommence. Tout au long de l’année 1766, les attaques demeureront localisées dans le même secteur que précédemment, aux confins du Cantal, de la Lozère et de la Haute-Loire actuels. Leur rythme paraît se restreindre, mais il s’agit peut-être d’un biais dû aux sources. En effet, la Bête est officiellement considérée comme morte, si bien que l’administration locale et les habitants sont livrés à eux-mêmes. Ainsi, l’historien ne peut plus compter sur l’abondante correspondance générée par les différents responsables de la chasse à la Bête, documents bien utiles pour combler les lacunes des registres paroissiaux, dont on a constaté (justement en les croisant avec d’autres documents) qu’ils n’enregistraient pas systématiquement les actes de sépulture des victimes de la Bête.

Toujours est-il que les habitants de la Margeride vivront, impuissants, de longs mois de terreur. Ni les campagnes d’empoisonnement menées par les autorités du Gévaudan, ni les chasses dirigées sporadiquement par les nobles du crû, n’entraveront la marche sanglante de l’animal. Seul l’hiver y parviendra, du moins en apparence : pendant quatre mois, les registres paroissiaux ne signalent aucun décès imputable à la Bête – ce qui ne signifie pas, comme on l’a vu, qu’il n’y en ait pas eu.

Toutefois, la Bête reprend ses ravages dès mars 1767, cette fois à un rythme accru, semble-t-il. Les victimes se multiplient tout au long du printemps, jusqu’à ce que le 19 juin, au cours d’une énième battue, un chasseur local nommé Jean Chastel tue, sur les pentes du mont Mouchet, un animal que lui et ses compagnons identifient comme étant la Bête. Autopsié par un chirurgien, un procès-verbal dressé par un notaire le décrit comme « un loup, mais extraordinaire et bien différent par sa figure et ses proportions que les loups que l’on voit dans ce pays ». Toujours est-il que les attaques cessent alors définitivement : le Gévaudan est délivré de sa Bête. En trois ans, elle aura fait une centaine de victimes – le décompte variant selon les auteurs, de 85 à plus de 120.

Historiographie

Durant plus d’un siècle, l’identification traditionnelle de la Bête à des loups n’est guère remise en cause. De fait, la plupart de ceux qui l’ont chassée (d’Enneval, Antoine, ou encore le subdélégué[4] de Mende Étienne Lafont) l’identifiaient alors comme telle, sur la foi des empreintes relevées sur les lieux des attaques, de récits de témoins et de l’examen des dépouilles des animaux abattus. Pour eux, le vocable de « Bête du Gévaudan » désignait simplement plusieurs grands loups anthropophages, ayant sévi de manière concomitante.

Le premier à battre cette idée en brèche est un ecclésiastique, l’abbé Pierre Pourcher, qui publie en 1889 la première étude historique sur l’affaire, intitulée Histoire de la Bête du Gévaudan, véritable fléau de Dieu. Comme son titre l’indique, cette somme de plus de 1000 pages [5] privilégie la thèse d’un prédateur unique, un monstre surnaturel d’origine divine. Natif du Gévaudan et petit-fils d’un contemporain des événements, Pourcher s’appuie beaucoup sur la tradition orale, qu’il consigne fidèlement mais sans recul méthodologique. Il effectue également un gros travail de dépouillement d’archives, ouvrant ainsi la voie aux autres historiens de la Bête.

À sa suite, de nombreux auteurs vont compléter son travail – comme son confrère l’abbé François Fabre [6] – et émettre leurs propres hypothèses sur la nature de la Bête. Celles-ci furent aussi variées que, parfois, surprenantes : un homme déguisé en Bête [7], un ours, un animal exotique (faites votre choix : hyène, glouton [8], lycaon, thylacine, tigron [9] et même babouin [10]…), voire même un cryptide [11] ou la survivance tardive d’un prédateur préhistorique. Parallèlement, d’autres auteurs continueront à privilégier la culpabilité des loups [12].

Dans le même temps, l’évolution des connaissances en zoologie, ainsi que les travaux de l’éthologie, la science du comportement animal – dont on attribue généralement la paternité à Konrad Lorenz au milieu du XXème siècle – vont conduire à une révision de l’attitude générale vis-à-vis du loup, dont on va désormais douter qu’il puisse attaquer spontanément l’être humain pour s’en nourrir. Du prédateur occasionnellement anthropophage, on va ainsi passer à l’image d’un loup trop craintif à l’égard de l’homme pour en faire sa proie [13].

Dans la lignée de cette approche, qui doit sans doute aussi beaucoup à la raréfaction du loup en Europe occidentale (il disparaît totalement de France durant la première moitié du XXème siècle) ainsi qu’à l’émergence de l’écologie dans les années 1970, des auteurs tentent de réfuter la culpabilité du loup dans l’affaire de la Bête du Gévaudan, offrant des explications alternatives de plus en plus élaborées. Gérard Ménatory, par ailleurs très impliqué dans la conservation et la réintroduction du loup (il sera le fondateur du Parc à loup du Gévaudan, à Ste-Lucie, en Lozère), sera l’initiateur de cette tendance, relayé ensuite par Raymond-Francis Dubois[14].

Représentation de la chasse du 21 septembre 1765. (B.N.)
La pseudo-bête d’Antoine de Beauterne exposée au jardin de Versailles.


Michel Louis

Le plus abouti et le plus connu des ouvrages adoptant ce point de vue est celui de Michel Louis, intitulé La Bête du Gévaudan, l’innocence des loups. Paru pour la première fois en 1992, il a par la suite été augmenté et réédité plusieurs fois [15]. Ce succès lui vaut une certaine renommée parmi ceux qui s’intéressent à la Bête du Gévaudan, et amène également son auteur à servir de principal consultant au cinéaste Christophe Gans lorsque celui-ci réalise, en 2001, son film sur la Bête, Le pacte des loups.

Pour ma part, j’ai découvert ce livre – le premier que j’ai lu à être consacré exclusivement à la Bête du Gévaudan – en 2001, et sa lecture m’avait alors beaucoup impressionné, faisant naître en moi une véritable passion pour cette affaire. On peut résumer l’explication qu’il promeut de la manière suivante : pour Michel Louis, la Bête est un hybride chien x loup, délibérément dressé à des fins meurtrières par un noble local (en l’occurrence, l’auteur soupçonne le comte Jean-François-Charles de Morangiès) et conduit sur le terrain par Antoine Chastel, le propre fils de celui qui tua la Bête en 1767.

Cette explication est peu économe en hypothèses. Elle nécessite le recours à de nombreuses inconnues, comme l’identité des maîtres de la Bête, ou l’obligation de l’affubler d’une protection en peau de sanglier (une idée que Louis emprunte à Dubois) pour expliquer son « invulnérabilité ». Néanmoins, elle s’avère séduisante à bien des égards. Ainsi, elle s’inscrit dans le contexte déjà cité de révision des connaissances sur le loup. En outre, elle demeure rationnelle, en comparaison d’autres hypothèses faisant intervenir un animal inconnu de la science ou une espèce exotique. À cela s’ajoute qu’elle paraît « coller » aux faits – du moins tels que Michel Louis les présente – et fait preuve une grande cohérence interne.

Elle présente toutefois de nombreux biais, mais ceux-ci me furent d’autant plus discrets que, n’étant alors guère porté sur la zététique, je n’étais pas outillé pour les détecter. Ce n’est que bien plus tard, après relecture, que je m’aperçus de leur présence. On trouve ainsi un subtil argument d’autorité dès les premières lignes, avec cette citation de Konrad Lorenz : « De récentes études sur les loups ont montré que l’on a jamais recensé avec certitude un seul cas où ces animaux, même tenaillés par la faim, auraient attaqué spontanément des êtres humains » [16] . Même s’il n’est pas présenté comme tel, Lorenz est néanmoins un récipiendaire du prix Nobel de renommée mondiale dont j’avais moi-même déjà entendu parler, alors même que je n’étais encore qu’un enfant au moment de sa mort.

De surcroît, M. Louis semble se livrer à l’occasion à un certain tri sélectif dans ses données, retenant surtout celles qui vont dans le sens de ses opinions et en passant d’autres sous silence lorsqu’elles les contredisent. Mais il faut évidemment, pour s’en apercevoir, prêter oreille à d’autres sons de cloche, d’autres auteurs, et croiser les sources, ce que je n’ai eu l’occasion de faire que bien des années plus tard. On citera encore le fait que les principales sources qu’emploie M. Louis pour accuser la famille Chastel d’avoir dressé la Bête sont en fait deux romans, ceux d’Abel Chevalley et Henri Pourrat [17] .

Mais en l’absence d’au moins une partie de ces constatations, la démonstration de Michel Louis me parut suffisamment convaincante pour que je fasse mienne sa conclusion, au moins en partie. Je souscrivais à l’idée d’un chien-loup dressé, qui paraissait la mieux à même d’expliquer raisonnablement toutes les caractéristiques de l’affaire. En revanche, je n’allais pas jusqu’à désigner nommément des coupables : aucune source ne le permettait réellement (les documents d’époque ne mentionnent la famille Chastel que de manière anecdotique), et les romans, même quand ils se réclament de la tradition orale, restent des romans – rien ne permettant de distinguer les faits réels de la licence artistique de l’auteur.

J’ai considéré cette version nuancée de l’explication fournie par Michel Louis comme celle correspondant le mieux aux faits durant des années. À défaut de pouvoir être démontrée de façon certaine (en l’absence de sources suffisamment décisives pour ce faire), elle me semblait au moins la plus plausible.


Rasoir d’Occam

Il s’agit d’un principe épistémologique bien connu, déjà maintes fois présenté dans ces pages ; toutefois, il demeure utile d’en faire ici un rappel, étant donné l’importance qu’il a eu dans ma démarche personnelle vis-à-vis de la Bête du Gévaudan. Également appelé « principe de parcimonie » ou « principe d’économie d’hypothèses », le rasoir d’Occam stipule que lorsqu’on est confronté à deux hypothèses pour expliquer un phénomène, et que celles-ci ne peuvent être départagées par d’autres moyens (par manque de sources ou de preuves, par exemple), il est préférable de privilégier la plus « économe » en conditions. En clair, il s’agit de choisir l’explication qui fait appel au moins d’inconnues dans son énoncé.

Pour ma part, j’utilise cet outil méthodologique non seulement au moment de conclure (si nécessaire), pour trancher entre deux hypothèses égales par ailleurs, mais également avant analyse, afin de déterminer approximativement dans quel ordre il faudra examiner les différentes explications possibles. Ainsi, j’ai l’habitude de me pencher prioritairement sur l’hypothèse la plus simple, ou celle qui sera la plus facile à vérifier. Pour cela, il faut toutefois que l’hypothèse la plus simple corresponde suffisamment aux faits.

Dans le cas de la Bête du Gévaudan, l’explication la plus simple entre toutes est de lui attribuer l’action d’un ou plusieurs loups, cet animal étant alors tout à fait commun en France, y compris dans la zone d’activité de la Bête – en l’espace de trois ans, plus de deux cents loups ont été abattus dans la région [18] . Il n’est en effet nullement nécessaire d’aller chercher, jusqu’en Afrique australe ou ailleurs, un prédateur exotique alors qu’on en a déjà un sous la main. Autant enquêter d’abord sur ce dernier.

Toutefois, en retenant l’idée selon laquelle le loup n’attaque pas l’être humain, cette explication devient improbable et cesse d’être pertinente pour expliquer les faits. Celle avancée par Michel Louis est certes moins économe en hypothèses, puisqu’elle fait intervenir des dresseurs dont il sera pratiquement impossible de vérifier l’existence et les actes. Mais elle paraît mieux correspondre aux éléments de l’affaire ; l’identité zoologique proposée (hybride chien x loup) est des plus ordinaires, un tel animal pourrait se dresser, et que des individus décident de le faire à des fins meurtrières n’aurait rien de très surprenant en regard des agissements de certains représentants de l’espèce humaine – les études récentes sur le meurtre en série tendent à montrer qu’il ne s’agit sans doute pas d’un phénomène propre à notre époque [19] .

Outre le rasoir d’Occam, la démarche scientifique a ceci de particulier que les connaissances sur un sujet donné sont amenées à être révisées en fonction des éléments nouveaux disponibles sur ledit sujet : le savoir produit par la science s’enrichit ainsi constamment. Bien sûr, cette révision ne se fait pas sans raison, et il faut que les éléments apportés soient suffisamment probants pour la justifier.

La clé du problème était donc le comportement du loup vis-à-vis de l’homme. Estimant qu’il ne s’en prenait pas à l’être humain, je privilégiais une explication moins « économe ». Mais que de nouveaux éléments probants viennent remettre cette idée en cause, et l’hypothèse « loup » redeviendrait aussi plausible que l’hypothèse « animal dressé ». Rasoir d’Occam oblige, il faudrait alors considérer à nouveau l’hypothèse « loup » comme prioritaire.


Kenton Carnegie

En ce qui me concerne, ces éléments ont été portés à ma connaissance fin 2008, lorsque je suis tombé, par hasard, sur une affaire ayant donné lieu à une vive controverse au Canada. Il s’agit de la mort de Kenton Carnegie, un jeune homme apparemment tué par des loups en 2005.

Carnegie était un étudiant en géologie de 22 ans, en mission dans le nord du Saskatchewan, une région qui connaît régulièrement des attaques d’ours, mais voyait aussi se multiplier les rapports signalant des comportements agressifs de la part de loups en bonne santé (il ne s’agissait pas d’animaux atteints de la rage). Ces incidents se produisaient surtout à proximité des décharges : en effet, si la région demeure relativement isolée, elle fait cependant l’objet d’une activité humaine importante, liée à l’exploitation minière. Ces décharges sont rapidement devenues, pour les loups, une source de nourriture facilement accessible.

Celle située à proximité du camp où stationnait Carnegie n’échappait pas à cette règle. Le 4 novembre 2005, deux de ses collègues avaient été apparemment menacés par deux loups, et des photos de l’incident avaient été prises. Toutefois, celles-ci étaient équivoques, laissant à penser que les deux jeunes gens avaient en fait provoqué les loups, et leur histoire ne fut guère prise au sérieux par le reste de l’équipe. Dans ce contexte pesant, Carnegie sortit se promener seul dans l’après-midi du 8 novembre, mais ne revint pas. Il sera retrouvé mort, à demi dévoré, quelques heures plus tard [20] .

Une première enquête constata que les éléments (traces, morsures) observés sur place par le groupe qui a récupéré le corps sont équivoques, en partie parce que les constatations d’usage, effectuées de nuit dans des conditions difficiles, ont été bâclées. Le rapport d’enquête s’abstient prudemment de conclure sur la nature exacte de l’espèce responsable, se bornant à établir que Carnegie a été tué par un ou plusieurs animaux sauvages, probablement des loups ou un ours [21].

Cette indécision va déclencher une vive polémique entre la famille de la victime et les enquêteurs. En effet, personne, sur les lieux, n’avait rapporté avoir vu d’ours aux alentours du camp durant le mois qui avait précédé le drame, pour la simple et bonne raison qu’à ce moment de l’année, les ours sont déjà censés hiberner. Se basant sur cela, la famille Carnegie va lancer une contre-enquête privée qui amènera de nombreux éléments suggérant la culpabilité des loups, et qui paraissaient avoir été ignorés ou mal interprétés lors de l’enquête initiale [22].

Bien que révélés dans un contexte émotionnellement très chargé, sur lequel était venu se greffer un débat sur la dangerosité du loup et la pertinence de sa politique de conservation, ces éléments se sont avérés suffisamment probants aux yeux de la justice canadienne. Celle-ci ordonna donc la réalisation d’une seconde enquête officielle, qui conclut cette fois, en novembre 2007, à la culpabilité des loups.


L’être humain : une proie ?

Il m’apparut bientôt que l’affaire Carnegie n’était pas un cas isolé. Elle s’inscrivait dans un contexte plus général où, après la peur du « méchant loup » initiale, puis la réaction qui suivit en faveur du « gentil loup », les zoologues et les autorités de conservation de la faune cherchent à dresser un portrait plus objectif et dépassionné des rapports humain-loup.

Cette optique nouvelle a notamment été marquée par une étude d’envergure destinée à répondre à cette question cruciale : le loup représente-t-il un danger pour l’homme, et si oui, pourquoi, et dans quelles circonstances ? Commandé par l’Institut norvégien de recherche sur la nature, ce travail a été réalisé par une équipe internationale dirigée par John Linnell, avant d’être publié en anglais [23] en 2002.

Bien qu’assez générale et faisant parfois appel à des sources de seconde main (mais dont les auteurs reconnaissent les défauts dans leur introduction), cette étude aboutit néanmoins à une série de recommandations à l’usage des organismes et institutions de préservation de la nature. Elle affirme que les attaques de loups sur l’être humain sont rares, et généralement le fait d’animaux atteints de la rage. Il existe également toutefois des attaques perpétrées par des loups en bonne santé ; ces attaques sont épisodiques, l’humain ne faisant pas partie du régime alimentaire normal du loup.

De telles attaques étant rares, elles se produiraient dans des circonstances bien spécifiques. L’équipe de J. Linnell pointe du doigt les environnements très humanisés, notamment lorsque ceux-ci mènent à une situation de proximité, pour ne pas dire une promiscuité, entre les humains et les loups. Cette proximité mènerait à un autre facteur aggravant, les loups s’habituant aux humains et perdant la méfiance qu’ils éprouvent à leur égard. De menace, l’humain pourrait alors devenir proie. En outre, les loups attaquant des êtres humains pour s’en nourrir auraient tendance à continuer à le faire par la suite.

On retrouve cette optique dans l’historiographie récente des attaques de loups en France en général, et dans celle de la Bête du Gévaudan en particulier. L’historien Jean-Marc Moriceau, chercheur à l’université de Caen, s’est spécialisé dans ce champ d’études, publiant coup sur coup deux ouvrages. Le premier, Histoire du méchant loup, est une étude reposant sur un corpus de 3.000 cas supposés d’attaques de loups [24], et le second est spécifiquement dédié à la Bête du Gévaudan [25].

Tous ces éléments nouveaux – et documentés – m’ont donc conduit à réviser mon approche de l’affaire. En application du rasoir d’Occam, je me devais en effet de reconsidérer l’hypothèse loup en priorité : plus « économe », elle semble en effet être en mesure d’expliquer les faits sans recourir à de trop nombreuses inconnues, et autres considérations invérifiables ou spéculatives.


Jean-Marc Moriceau

J’ai fait l’acquisition des deux ouvrages en question ; en revanche, faute de temps, il ne m’a été possible de lire intégralement que le second. Du premier, je ne peux donc parler que suite à un examen très succinct ; mais il s’agit de toute évidence d’un travail universitaire très fouillé, dense, regorgeant de méta-sources (une cinquantaine de tableaux), et reproduisant le corpus de cas étudié en annexe (sur 100 pages). Pourvue en outre d’une bibliographie importante, cette somme de plus de 600 pages ne saurait être ignorée – et je compte bien la disséquer avec attention lorsque j’en aurais l’occasion.

On retrouve la même rigueur d’historien dans son second livre, bien qu’il s’agisse cette fois d’un opus moins « académique », puisque destiné à un public élargi. Ce travail conclut que la « Bête du Gévaudan » était très probablement plusieurs loups anthropophages. Il est globalement assez convaincant, même s’il présente quelques menues faiblesses apparentes m’empêchant de le considérer comme une réponse « définitive » à l’énigme. Sans aller jusqu’à une note de lecture détaillée, en voici les principales forces et faiblesses.


Les « plus »

J.-M. Moriceau fournit des explications simples aux éléments réputés mystérieux ou anormaux dans l’histoire de la Bête. En premier lieu, les décapitations, qui n’ont rien de surprenantes selon lui : elles résulteraient de l’action de la mâchoire du prédateur à l’articulation entre l’atlas et l’axis, partie vulnérable chez des individus de médiocre constitution. L’invulnérabilité rapportée de la Bête trouve aussi sa solution : la succession d’un hiver 1764-65 doux, puis d’un été 1765 humide, laissent à supposer que la poudre noire employée par les chasseurs pour leurs fusils, mal conditionnée durant les chasses, était parfois mouillée. Perdant ainsi une partie de leur puissance d’arrêt, balles et plombs tirés sur les animaux visés n’auraient pas, occasionnellement, causé de blessures suffisamment profondes pour être mortelles ou incapacitantes. Nul besoin de cuirasse pour la Bête, donc.

L’ubiquité supposée de la Bête est également mise à mal, avec la solution a priori la plus simple : l’action de plusieurs loups. Ici, l’auteur entre en contradiction directe avec Michel Louis, qui réfutait aussi cette ubiquité mais pour une raison bien différente : les déplacements de la Bête seraient selon lui compatibles avec un animal unique. Toutefois, l’examen des faits rapportés par Moriceau laisse à penser que Louis aboutit à cette conclusion par ignorance ou omission de certaines attaques – exemple potentiel de tri sélectif des données de la part du défenseur des loups.

Moriceau fait également remarquer la dimension sociologique récurrente des descriptions de la Bête : celles-ci sont parfois rigoureusement similaires à celles d’autres animaux dévorants, antérieurs de plusieurs décennies, un peu comme si un animal s’en prenant aux humains devait nécessairement présenter des caractéristiques précises dans la culture d’alors. Du reste, les descriptions extraordinaires qui en sont faites sont contredites par le fait que la Bête est souvent prise pour un chien par ceux qui la voient, voire identifiée explicitement comme un loup. À cette occasion, l’historien exhume des sources et des témoins que Michel Louis ignorait ou récusait.

En outre, les attaques de la Bête du Gévaudan correspondraient à la typologie établie récemment par le zoologue Hans Kruuk pour les attaques de loups [26] : il y est notamment question d’agressions en binômes, avec un seul animal actif, une caractéristique rapportée par plusieurs témoins lors de l’affaire (signalons ici que, contrairement à une idée largement répandue, environ la moitié des attaques imputées à la Bête du Gévaudan s’est produite devant témoins, et que de surcroît, toutes les victimes n’ont pas été tuées). Jean-Marc Moriceau restitue par ailleurs très bien l’affaire dans son contexte global, qu’il maîtrise. Il rappelle notamment que la Bête du Gévaudan, loin d’être un cas isolé, s’inscrit dans la lignée d’autres « loups dévorants ».


Les « moins »

L’opus de Moriceau n’explique pas pourquoi ces épisodes de prédation sur l’être humain seraient paroxystiques plutôt que ponctuels. La solution, toutefois, se situe peut-être dans les ouvrages qu’il cite, et l’on perçoit en filigrane de son propre livre des éléments de réponse. Dans le cas du Gévaudan, par exemple, une épizootie aurait réduit la quantité de proies (animaux sauvages ou domestiques) disponible pour les loups, lesquels, par ailleurs, s’habitueraient très rapidement à la prédation sur les humains.

Il demeure, en dépit de ces pistes explicatives, un paradoxe dans l’explication proposée. Moriceau estime à pas moins « d’une dizaine » le nombre de loups anthropophages en Gévaudan entre 1764 et 1767. Toutefois, accroître le nombre de prédateurs (là où la plupart des auteurs n’en citaient généralement que trois ou quatre) rend d’autant plus étonnant le caractère paroxystique, limité dans le temps comme dans l’espace, de l’affaire.

En effet, des dizaines de loups ont été tués en Gévaudan pendant le déroulement de l’affaire, et la mort de deux seulement a eu une incidence quelconque sur le rythme des attaques. Dans le second cas (celui abattu par Jean Chastel), l’interruption est même aussi définitive que brutale, alors que les agressions, loin de s’espacer (comme on devrait logiquement s’y attendre en supposant une réduction progressive du nombre de loups anthropophages), étaient de plus en plus fréquentes au printemps 1767.

Au passage, et pour répondre à une idée vers laquelle oriente souvent le bon sens de bien des lecteurs, on précisera ici que les attaques perpétrées dans le Gévaudan ne peuvent être mises sur le compte de la rage, la typologie des épisodes rabiques (un animal malade attaquant parfois des dizaines de personnes en quelques heures seulement) étant très différente. Dans le cas du Gévaudan, il s’agit bien d’attaques de prédation visant une proie unique, ce que Moriceau ne manque pas de faire remarquer.

L’auteur est peu à l’aise avec certaines questions, notamment sur la décapitation de certaines victimes : il évoque ainsi une « impression de décapitation » dans un cas où l’acte de sépulture de la victime précise explicitement que la tête est manquante. Il reste également très circonspect dans l’identité des différents loups anthropophages : bien souvent, rien ne permet une identification positive et de nombreux loups ont été tués sans que cela n’ait d’impact sur la fréquence des attaques.

On retrouve aussi parfois quelques contradictions, certes mineures, mais qui laissent la fâcheuse impression que l’auteur tend à passer un peu vite sur certains détails, ou à les interpréter un peu rapidement comme allant dans le sens de ses conclusions. Ainsi, une louve tuée en avril 1765 (avec des restes humains dans son estomac) se mue en « couple de loups » bien que rien ne la mentionne accompagnée ; un autre, abattu en août 1765, est mentionné comme anthropophage sur la seule foi d’une caractéristique physique jamais mentionnée auparavant.


Conclure ?

L’ouvrage de Jean-Marc Moriceau a cependant le grand mérite de rappeler que l’affaire du Gévaudan marque une évolution importante dans la politique vis-à-vis du loup en France : jusque-là chassé sporadiquement (par des institutions comme la louvèterie royale), il va dès 1765 faire l’objet de campagnes d’éradication systématique – une élimination accélérée par l’épidémie de rage de 1766-67, concomitante, mais distincte, des ravages de la Bête. Partant de là, il est finalement logique que cette affaire, à l’heure du retour du loup en France, cristallise les intérêts passionnels des « pro » et des « anti » loup. Ce que l’auteur souligne avec pertinence à la fin de son ouvrage, tout en appelant à une compréhension plus objective et pragmatique du rapport entre le loup et l’espèce humaine.

Pour ma part, je suspends encore mon jugement définitif. Mon opinion actuelle est que Moriceau va probablement dans la bonne direction, bien que les détails précédemment évoqués m’empêchent d’adhérer intégralement à sa thèse. Pour trancher, il me faudrait approfondir et examiner moi-même, en détail, les centaines de pages que représentent les différents documents sur l’affaire, sans parler de la bibliographie qui l’entoure. Toutes choses hors de ma portée actuellement, sans parler de l’éloignement chronologique, qui nous rend tributaires de sources forcément incomplètes. Ma position personnelle et mon parcours vis-à-vis de l’affaire sont en fait très similaires à ceux explicités par Alain Bonet dans l’introduction de sa somme documentaire consacrée à la Bête [27], qu’il résume par ailleurs en citant Socrate : « je sais que je ne sais rien ».

De telles difficultés sont le lot commun de tout chercheur qui s’y intéresse : il faut bien admettre que l’affaire n’est pas simple, ce qui ne fait qu’amplifier les controverses qui l’accompagnent encore aujourd’hui. Aux zones d’ombre d’une documentation parfois fragmentaire ou d’interprétation délicate, qui n’en finiront pas de faire travailler les imaginations, s’ajoutent les enjeux affectifs et contemporains autour de la relation humain-loup, qui donnent, paradoxalement, un tour étonnamment actuel à une affaire pourtant vieille de bientôt 250 ans.

Eric Déguillaume

 

Notes

[1] – Dragons : corps de troupe rattaché à la cavalerie. Il s’agissait de soldats se déplaçant à cheval, mais capables de combattre aussi bien montés que pied à terre, comme des fantassins.

[2] – Sous l’Ancien régime, les louvetiers (ou lieutenants de louvèterie) étaient des fonctionnaires royaux spécifiquement chargés de mener et coordonner la chasse aux loups.

[3] – Cette fonction (très) honorifique consistait en fait à organiser les chasses du roi – ce qui n’était pas une mince affaire quand on sait à quel point Louis XV était passionné par la chasse. Issue de l’entourage quotidien du roi, la mission d’Antoine donne une idée de l’importance qu’avait alors prise l’affaire.

[4] – Le subdélégué était le représentant de l’administration royale à l’échelle du diocèse (en taille, l’équivalent d’un département actuel). Son rôle était assez similaire à celui d’un préfet de nos jours.

[5] Pierre POURCHER, Histoire de la Bête du Gévaudan, véritable fléau de Dieu, St-Martin-de-Boubaux, chez l’auteur, 1889 ; récemment réédité à Marseille, Jeanne Laffitte, 2006.

[6] – François FABRE, La Bête du Gévaudan en Auvergne, Saint-Flour, chez l’auteur, 1901 ; La Bête du Gévaudan, Paris, Floury, 1930 – ce dernier enrichi par Jean RICHARD (le propriétaire du Musée de la Bête à Saugues) et réédité à Clermont-Ferrand, De Borrée, 1999.

[7]- P. PUECH, « Qu’était la Bête du Gévaudan ? »,Mémoires de l’Académie des Sciences et Lettres de Montpellier, pp. 409-431, 1910 ; Pierre CUBIZOLLES,Loups-garous en Gévaudan, le martyre des innocents, Brioude, Watel, 1995.;

[8]- Alex MARQUES, La Bête qui mangeait le monde en Gévaudan, Mende, Société de Lettres, Sciences et Arts de la Lozère, 1993.

[9]- Croisement issu d’un tigre et d’une lionne. René DE CHANTAL,La fin d’une énigme, la Bête du Gévaudan, Paris, la Pensée Universelle, 1983.

[10]- Guy CROUZET, Quand sonnait le glas au pays de la Bête, Clermont-Ferrand, CRDP, 1985. L’auteur a ensuite abandonné cette hypothèse d’appoint (il tient le loup comme le principal coupable) dans un ouvrage ultérieur.

[11]- Terme employé par les cryptozoologues pour désigner une espèce animale qu’ils tiennent pour existante, mais non encore répertoriée par la zoologie descriptive. Le principal cryptozoologue à s’être penché sur l’affaire a, pour sa part, écarté l’idée que la Bête fût un cryptide, privilégiant, après analyse informatique, celle d’une intervention humaine. Jean-Jacques BARLOY, Les survivants de l’ombre, Paris, Arthaud, 1985.

[12] – Sylvain GAGNIERE, « La Bête du Gévaudan était bien un loup », Revue du Gévaudan, des Causses et des Cévennes, pp. 142-146, 1960 ; Jacques DELPERRIÉ DE BAYAC, Du sang sur la montagne, Paris, Fayard, 1970 ; Xavier PIC, La Bête qui mangeait le monde en pays de Gévaudan et d’Auvergne, Paris, Albin Michel, 1971 ; Félix BUFFIERE, La Bête du Gévaudan, une grande énigme de l’histoire, Toulouse, chez l’auteur, 1987 ; Guy CROUZET, Requiem en Gévaudan, Clermont-Ferrand, CRDP, 1992 et La grande peur du Gévaudan, Moulins, chez l’auteur, 2001.

[13] – Robert HAINARD, Mammifères sauvages d’Europe, Paris, Delachaux et Niestlé, 1962 ; Gérard MÉNATORY, Le loup, du mythe à la réalité, Marvejols, chez l’auteur, 1984.

[14] – Gérard MÉNATORY, La Bête du Gévaudan, histoire, légende, réalité, Mende, 1984 ; Raymond-Francis DUBOIS, Vie et mort de la Bête du Gévaudan, Liège, Ogam, 1988. Ce dernier ouvrage est à ne pas confondre avec celui du même auteur, paru en 1989 chez le même éditeur, qui est un roman intitulé L’enfer n’a pas de porte, le livre de la Bête en Gévaudan.

[15]- Michel LOUIS, La Bête du Gévaudan, l’innocence des loups, Paris, Perrin, 1992, 1997, 2000, 2003…

[16] – Louis, 2000, p. 7.

[17] – Abel CHEVALLEY, La Bête du Gévaudan, Paris, Gallimard, 1936 ; Henri POURRAT, Histoire fidèle de la Bête du Gévaudan, Clermont-Ferrand, chez l’auteur, 1946.

[18] – LOUIS, 2000, p. 224.

[19] – On renverra à ce sujet à l’excellent site Internet www.tueursenserie.org, véritable mine d’analyses critiques (et lucides) sur la question.

[20] – Un bon résumé de cette affaire peut-être lu sur le Wikipedia anglophone. Indice de qualité, il cite d’abondantes sources. http://en.wikipedia.org/wiki/Kenton_Joel_Carnegie_wolf_attack

[21] – Voir par exemple le rapport de nécropsie d’un des deux loups tués immédiatement après la mort de Carnegie, à la rédaction ambiguë et disponible ici (en anglais) :
http://www.cbc.ca/sask/features/wolves/images/wolves1-2.pdf

[22] – Un des éléments décisifs de cette contre-enquête fut l’étude de Valerius Geist, disponible (en anglais) en deux parties :
http://wolfcrossing.org/blog/wp-content/uploads/2007/10/carnegie-no1.pdf et http://wolfcrossing.org/blog/wp-content/uploads/2007/11/dr-valarius-geist-re-carnegie-ii.pdf

[23] – John LINNELL et alii, The fear of wolves : a review of wolf attacks on humans, Trondheim, Norsk Institutt for NAturforskning, 2002. Une traduction française est accessible à l’adresse
http://www.lcie.org/Docs/Damage%20prevention/Linnell%20NINA%20OP%20La%20Peur%20du%20loup.pdf

[24] – Jean-Marc MORICEAU, Histoire du méchant loup, 3.000 attaques sur l’homme en France, XVème – XXème siècle, Paris, Fayard, 2007.

[25] – Jean-Marc MORICEAU, La Bête du Gévaudan, Paris, Larousse, 2008.

[26] – Hans KRUUK, Chasseurs et chassés, relations entre l’homme et les grands prédateurs, Paris, Delachaux et Niestlé, 2005.

[27] – Alain BONET, La Bête du Gévaudan, chronologie et documentation raisonnées, en ligne.
http://www.labetedugevaudan.com/pages/chronobonet.html

 

La Bête du Gévaudan : état des lieux et parcours personnel