Écrit par Jean-Louis RACCA, 14 Avril 2006.

 

Étude de l’argumentation du livre « Pourquoi tant de haine ? » d’Elisabeth Roudinesco, réaction au « Livre Noir de la psychanalyse ».

 

« Croire ou vérifier : l’alternative est inéluctable. »(1)

 

I. Contexte et motivation

Le 1er septembre 2005 sortait en librairie le « Livre Noir de la Psychanalyse »[1]. Cet ouvrage rassemblait les contributions d’une quarantaine d’auteurs de dix nationalités, historiens, philosophes journalistes, psychologues, contributions qui offraient une lecture largement critique de ce qui était jusqu’alors accessible au grand public francophone en matière d’histoire, de théorie et de pratique de la psychanalyse.

Ce livre a suscité beaucoup de commentaires, dans la presse française en particulier. Le plus souvent, ces commentaires ont été assez négatifs quant au contenu et aux motivations réelles ou présumées de cet ouvrage, à l’exception notable du Nouvel Observateur qui a fait la « une » de son numéro du 1er septembre sur ce sujet. Ce numéro a publié des extraits significatifs du livre, ainsi qu’un débat entre l’un des auteurs, Jacques Van Rillaer, et un historien de la psychanalyse, Alain de Mijolla.

Sans prendre position sur le fond, je pense que ce « Livre Noir » est un élément de débat qui devrait être pris en compte dans un pays comme le nôtre où la psychanalyse a plutôt une bonne image et une grande influence dans divers domaines. À ce titre, il mérite d’être lu. Pas approuvé aveuglément, mais lu. Ne serait-ce que pour savoir ce que d’aucuns reprochent a la psychanalyse (2).

Or, plusieurs semaines avant la sortie du livre, Elisabeth Roudinesco, qui se définit comme psychanalyste et historienne de la psychanalyse3 et qui a écrit de nombreux ouvrages sur ce thème, a envoyé à divers journaux, organisations et associations une « note de lecture »4 contenant un certain nombre d’affirmations visant à décrédibiliser le « Livre Noir » et, pour ce qui concernait les critiques littéraires des journaux, à ne pas en rendre compte et à boycotter ses auteurs.

Ceci est confirmé par Laurent Joffrin, rédacteur en chef du Nouvel Observateur : « Élisabeth Roudinesco a d’abord refusé de débattre avec un quelconque auteur du « Livre noir ». Elle nous a ensuite encouragés à passer sous silence purement et simplement l’ouvrage et à remplacer les extraits prévus par un long entretien avec elle. Le livre, disait-elle en substance, est politiquement louche, à la limite de l’antisémitisme5. Accusation aussi grave que ridicule quand on connaît les auteurs du livre. »6.

Cette note « de lecture » a été largement diffusée sur le Net et ses arguments, dont je m’attacherai à montrer ici que beaucoup sont fallacieux et manipulateurs (et sont à ce titre l’objet d’une analyse zététique), ont pu ensuite être repris largement, y compris par des gens qui n’ont aucune connaissance du contenu réel du Livre Noir. Elisabeth Roudinesco est en effet considérée par beaucoup comme une informatrice tout à fait digne de confiance.

En novembre 2005, Elisabeth Roudinesco a publié un opuscule7 intitulé « Pourquoi tant de haine ? », sous-titré « anatomie du Livre Noir de la psychanalyse » (Roudinesco, 2005).

 

II. Objectifs

Sans prétendre à l’exhaustivité, le présent travail se veut une étude de quelques points d’argumentation utilisés par Élisabeth Roudinesco dans cet opuscule.

Cette étude se prévaut d’un esprit critique au sens usuel – relevés de contradictions, d’erreurs manifestes – mais elle s’appuiera parfois aussi sur les outils de la zététique et en particulier sur ses « effets »[2] , tels qu’ils ont été définis par Henri Broch, ainsi que sur certains outils du scepticisme tels que « listés » par exemple par Michael Shermer.[3]

 

III. Structure du livre

L’opuscule concerné est en fait un recueil de textes. Le premier tiers reprend l’essentiel des notes, abusivement qualifiées « de lecture », évoquées ci-dessus. Le deuxième tiers se compose essentiellement de le reproduction de l’interview accordée par Elisabeth Roudinesco à l’Express, le 5 septembre 2005, à laquelle l’un des auteurs du « Livre Noir de la Psychanalyse » a apporté une solide réfutation.[4]

Enfin, le dernier tiers se compose de trois interventions dont une seule est inédite, les deux autres ayant déjà paru dans la presse8. Ces trois textes ne sont pas d’Elisabeth Roudinesco, mais ils se réfèrent souvent à ses écrits ou à ses prises de position. Ceci constitue d’ailleurs l’un des problèmes de l’ouvrage : l’autoréférence ; quand il n’y a pas absence de références tout court. L’ouvrage ne contient, en effet, aucune bibliographie. Ce qui gêne considérablement la tâche du lecteur qui chercherait à vérifier ses affirmations.

 

IV. Étude

Dans la suite de ce document, nous allons dans chaque section citer un extrait de l’ouvrage (contextualisé si nécessaire), rappeler l’effet zététique qui nous semble le plus approprié, puis analyser l’extrait à la lumière de celui-ci.

 

IV.1. Fausse interdiction, vrai mensonge (ou l’effet « petits ruisseaux »)
Effet Petits ruisseaux : si les petits ruisseaux font les grandes rivières, les petits oublis (ou erreurs) permettent les grandioses théories.

Pour situer le contexte de l’extrait suivant, un petit rappel historique.

En 1996 devait avoir lieu une « Exposition Freud » à la Bibliothèque du Congrès à Washington. Estimant que ses organisateurs faisaient la part trop belle à une certaine orthodoxie freudienne, des chercheurs prirent alors l’initiative de leur adresser une pétition demandant son report et la participation de certains d’entre eux à l’organisation. Cette pétition en entraîna une deuxième, initiée par Elisabeth Roudinesco ; à laquelle répliquèrent, par une troisième, les signataires de la première. On trouvera les trois textes dans l’annexe A.

L’exposition eut finalement lieu en 1998.

Ceci précisé, examinons ce qu’affirme Elisabeth Roudinesco[5] p. 16 (y compris la note de bas de page) :

« Dans les deux premières parties, « La face cachée de l’histoire freudienne » et « Pourquoi la psychanalyse a eu tant de succès », sont rassemblés des textes et des entretiens d’historiens majoritairement anglophones et connus pour leurs positions dites « révisionnistes » : c’est ainsi qu’ils se sont eux-mêmes désignés, il y a vingt ans, en prétendant réviser les mythes fondateurs de l’imposture freudienne. On les appelle aujourd’hui aux USA les « destructeurs de Freud ». Ils sont minoritaires et ont fini, à cause de leurs excès, par être marginalisés après avoir voulu faire interdire, en 1996, à l’aide d’une pétition, la tenue de la grande exposition Freud de Washington, jugée (à juste titre d’ailleurs) trop « orthodoxe »9. Mais est-il raisonnable de lutter contre l’ortho­doxie d’une discipline par des mesures d’interdiction ? Certainement pas. Et c’est pourquoi, à cette époque, j’avais pris l’ini­tiative avec Philippe Garnier d’une pétition internationale contre ce type de censure (*).

(*) Cf. Elisabeth Roudinesco, Pourquoi la psychanalyse ?, Paris, Fayard, 1999. L’exposition avait été organisée par la Library of Congress. »

Les expressions contestables ont été mises en gras. Elles me semblent relever de l’effet « petits ruisseaux ». Celui qui « consiste à développer une théorie grandiose à partir de petits « oublis » ou de petites « erreurs » qui sont absolument nécessaires à la crédibilité de ladite théorie. »

Pour mieux percevoir où sont les oublis et les erreurs d’Elisabeth Roudinesco, que le lecteur prenne le temps d’examiner les trois pièces données en annexe A. Il verra que dans la pétition qu’elle initie en réponse à celle des premiers signataires, elle proteste contre une interdiction… que ces derniers n’ont jamais demandée. Ce qui motive la troisième pétition.

Il verra ainsi qu’Elisabeth Roudinesco réécrit largement l’histoire. En brodant sur une fausse information (les signataires de la première pétition auraient voulu interdire l’exposition) et en réussissant à entraîner derrière elle pas mal de gens qui n’ont eu qu’une petite partie de l’information.

 

IV.2. « Menteur, charlatan, faussaire, plagiaire, ? » (ou l’effet « impact »)
Effet Impact : l’effet Impact consiste à utiliser la connotation, le poids des mots pour induire une idée un peu (ou très !) différente de celle que les mots prétendent représenter.

Extrait de la p. 9 :

« Freud est le plus attaqué: menteur, charlatan, faussaire, plagiaire, misogyne, drogué à la cocaïne, dissimulateur, propagandiste, obsédé sexuel, avide d’argent et de pouvoir, il est présenté comme une sorte de dictateur ayant trompé le monde entier avec une doctrine fausse. »

Celui qui va lire l’opuscule d’Elisabeth Roudinesco sans lire le Livre Noir de la Psychanalyse peut aisément penser que Freud y est réellement traité de tous ces noms ; et, pourquoi pas, peut-être dans la même phrase !

Or le « Livre Noir » montre, en utilisant en particulier de nouvelles pièces désormais disponibles de la correspondance de Freud10, ainsi que des résultats d’investigations récentes11 (connus depuis un certain nombre d’années à l’étranger), que plus d’une fois, et parfois sciemment, Freud a menti, truqué ses données pour qu’elles confirment ses théories, ou s’est montré englué dans les préjugés sexistes de la bonne société viennoise de son temps.

Effet « impact » également dans le titre du livre « Pourquoi tant de haine ? ». Il suffit pourtant de lire le Livre Noir de la Psychanalyse pour voir que la haine en est absente, même si certains faits qui y sont décrits peuvent être très durs à admettre pour les tenants français de la psychanalyse, peu habitués chez nous à entendre une critique pourtant non taboue à l’étranger…

Autre exemple d’effet impact : Elisabeth Roudinesco affirme (p. 26) « Le troisième [auteur cité, Mikkel Borch-Jacobsen] fait partie de l’école révisionniste américaine (dite des « destructeurs de Freud ») ».

En cherchant sur le Web en français, je n’ai pas trouvé cette expression… sauf dans des citations d’Elisabeth Roudinesco !

On touche d’ailleurs ici l’un des problèmes de l’absence de bibliographie du livre (voir introduction) : il est impossible de vérifier son affirmation, et ainsi de savoir si on peut la trouver ailleurs que dans les propres écrits de l’auteure ou si nous sommes en présence d’une prophétie autoréalisatrice.

En fait, le terme anglais auquel Elisabeth Roudinesco fait allusion est « Freud bashers »12, qui veut dire quelque chose comme « défonçeurs de Freud », ou « cogneurs de Freud ». Le mot est modelé sur « gay bashing », par exemple, qui veut dire bousculer, cogner, frapper les homosexuels. « Freud bashing » est donc un terme extrêmement péjoratif, employé par les défenseurs de la psychanalyse. Aucun critique de la psychanalyse ne se décrirait comme un « Freud basher », bien évidemment !

Il est fréquent par contre de parler de « Freud critics » ou de « Freud scholars » qui, eux, n’ont rien de méprisant.

La même chose vaut pour le terme « révisionniste » ; c’est Elisabeth Roudinesco qui parle de « révisionnistes », parce que ce terme évoque (en France, pas dans les pays anglo-saxons13) le négationnisme et permet de suggérer un lien obscur avec l’extrême-droite antisémite.

 

IV.3. L’attaque ad hominem
L’attaque ad hominem […] : littéralement « vis à vis de l’homme » […], cette erreur de raisonnement (voire cette manipulation) tend à réorienter une réflexion sur une idée vers une réflexion sur la personne qui émet cette idée. Le but d’une attaque ad hominem est de critiquer la personne qui affirme quelque chose dans l’espoir que cela constituera une critique de l’affirmation. Affirmer que quelqu’un est athée, communiste, pédophile ou néo-nazi n’est en aucun cas suffisant pour réfuter les déclarations de cette personne. Voir [3], point 17.

Elisabeth Roudinesco affirme (p. 26) que « deux [des auteurs principaux du « Livre Noir de la Psychanalyse », Jean Cottraux et Jacques Van Rillaer] n’ont aucune compétence en matière d’histoire du freudisme. »

Si elle voulait dire par là que ces deux auteurs n’ont pas de diplômes universitaires d’Histoire, peut-être aurait-elle raison. Et l’on peut même tout à fait comprendre qu’Elisabeth Roudinesco accorde a priori moins de crédit à des propos écrits par des hommes qui ne sont pas des « hommes de l’art ».

Mais il s’agit ici de disqualifier le contenu de ce qu’ils écrivent avant de l’avoir lu, y compris si ce contenu est pertinent. Or, si je ne connais pas les livres de Jean Cottraux, je prétends bien connaître les trois ouvrages majeurs de Jacques Van Rillaer[14, 15, 16]. Lorsqu’il est question d’histoire de la psychanalyse dans l’un d’entre eux, les événements décrits (fausse guérison d’Anna O., fabrication de données ad hoc concernant l’Homme aux loups, l’Homme aux rats, le président Schreber..) le sont conformément à ce qu’écrivent les « Freud scholars » diplômés en Histoire des sciences ou en épistémologie, Sulloway, Israëls, Shamdasani… dont les principaux ouvrages sont cités en références bibliographiques. N’est-ce pas là l’essentiel ?

 

IV.4. L’argument « Tu quoque »
Littéralement « toi aussi », cet argument consiste à croire que ses propres erreurs n’en sont pas parce que celui que l’on désigne comme son adversaire en commet aussi14.

Évoquant le débat organisé par le Nouvel Observateur entre Jacques Van Rillaer et Alain de Mijolla (voir plus haut), Elisabeth Roudinesco écrit :

« C’est à Ursula Gauthier15 qu’a été confié l’article dit de « synthèse » destiné à ouvrir enfin un grand débat en France sur les vérités cachées, etc.

On oppose ainsi, dans un prétendu débat objectif (dans le genre pour ou contre la rotation de la terre), le représentant d’une religion obscurantiste à un véritable savant qui, après être descendu dans l’enfer d’une secte, en est enfin revenu pour célébrer les bienfaits de la science et d’un traitement nouveau testé et évalué et qui prétend, par exemple, guérir la phobie des araignées en dix séances en proposant à des patients de se confronter d’abord à une araignée, puis à un troupeau d’araignées: la main, le bras, le corps entier. En lisant de telles choses, on se dit qu’il faudrait suggérer au propagateur de ce fabuleux traitement de le tester sur lui-même lors d’une émission de télé-réalité, en direct et en présence d’une armée d’évaluateurs. » (p. 40)

Précisons qu’ici Elisabeth Roudinesco fait allusion aux thérapies comportementales et cognitives (TCC) avec l’expression « traitement nouveau testé et évalué » (voir IV.5.).

On pourrait s’attarder sur la manière dont Jacques Van Rillaer et les TCC sont caricaturés et dénigrés dans cet extrait.

Mais on y trouve surtout un bel argument « Tu quoque » lorsque Elisabeth Roudinesco pense renforcer sa position et ses arguments par ces dénigrements eux-mêmes. Or, quels que soient les reproches (même éventuellement justifiés) qu’elle pourra adresser aux TCC, cela ne constituera pas logiquement un argument en faveur de la psychanalyse.

 

IV.5. Insinuation malveillante ou erreur manifeste : l’évocation du rapport de l’INSERM

« Philippe Douste-Blazy […] est brocardé pour avoir retiré du site de son ministère le rapport de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (INSERM) sur l’évaluation des psychothérapies. Il est accusé d’avoir « prémédité » son geste -on emploie d’ordinaire ce terme pour un crime ou un délit- avec la complicité de lacaniens fanatiques et intellectualisés, adeptes d’un maître qui aurait poussé au suicide toute une population de patients.

Les épreuves du livre ont circulé avant publication dans les médias et à l’INSERM. […] » (p. 11 et 12)

Elisabeth Roudinesco fait ici référence à un épisode qu’il est peut-être nécessaire de rappeler.

En février 2004, l’INSERM publiait le rapport d’une étude[17] à laquelle la Direction générale de la Santé, l’Union nationale des amis et familles de malades psychiques (UNAFAM) et la Fédération nationale des associations d’ex-patients de psychiatrie (FNAP-Psy) lui avaient demandé de procéder, trois ans auparavant.

Pour réaliser cette étude (portant sur l’efficacité de trois types de psychothérapies : la psychanalyse (et les thérapies dites « dynamiques »), la thérapie familiale et les TCC), les experts de l’INSERM ont analysé plus de 1000 recherches publiées dans la littérature scientifique internationale.

L’étude a conclu à une efficacité inférieure de la psychanalyse par rapport aux autres approches.

Elle a par ailleurs réfuté l’idée de « substitution de symptôme » que défendent les psychanalystes.

Or à la suite de près d’un an de protestations de diverses associations de psychanalystes, Philippe Douste-Blazy annonçait, lors d’un « Forum des psys » organisé à la Mutualité le 5 février 2005 par le psychanalyste Jacques-Alain Miller et dont le thème était « Le droit au secret », la suppression du rapport du site Internet du Ministère.

Les formulations utilisés par Elisabeth Roudinesco dans l’extrait ci-dessus sont particulièrement ambiguës. Le lecteur peut facilement en conclure que le Livre Noir de la Psychanalyse, dont elle nous dit par ailleurs tout le mal qu’il faut en penser, est à l’origine du rapport de l’INSERM et que, par conséquent, ce dernier est donc un mauvais rapport que le ministre a bien fait de retirer. Or il s’agit ici d’une erreur manifeste, au vu de la chronologie, le projet du « Livre Noir » datant au mieux (c’est-à-dire au plus tôt) de l’été 2004.

On peut aisément relever cette autre erreur manifeste, lorsque Elisabeth Roudinesco écrit : « Aucun des aspects positifs de la psychanalyse n’est mentionné, (…) ni Françoise Giroud qui disait devoir la vie à son analyse avec Lacan. » (p. 40)

Cette affirmation est parfaitement fausse puisqu’on peut lire, p. 204 du Livre Noir, « Françoise Giroud résumait le bilan de sa cure chez Lacan en ces termes : », phrase suivie d’un extrait d’interview donnée par Françoise Giroud en 1995.

 

IV.6. « Les auteurs du Livre Noir en font trop ou pas assez » (ou « pile je gagne, face tu perds ! »)

On lit, p.18-19 :

« Les auteurs du Livre noir s’approprient donc l’historiographie savante, celle dont je me réclame – et qui est issue à la fois d’Ellenberger, de Canguilhem et de Foucault – pour la mêler à une entreprise de dénonciation qui n’a plus rien à voir, ni avec l’étude critique, même sévère, des textes théoriques, ni avec la nécessaire mise à jour de l’histoire du mouvement psychanalytique: de ses moeurs souvent compassées, de ses crises, de ses errances, de sa propension à l’adulation des maîtres, de son dogmatisme, de son jargon et de ses véritables années noires (collaboration avec le nazisme ou les dictatures), évoquées en une ligne de manière ambiguë. Rien de tout cela n’est abordé dans ce livre, écrit dans une langue dénonciatrice, et truffée d’une terminologie évoquant les procès en sorcellerie : mystification, imposture, possession, préméditation, assassinats, meurtres, complots, etc. (…) »

Ici, il suffit de lire le livre pour constater que l’expression « rien » (dans la phrase « Rien de tout cela n’est abordé dans ce livre… ») est totalement infondée.

Et que veut dire « s’approprier l’historiographie savante » ? De nombreux auteurs du Livre Noir sont pourtant, dans le domaine des études freudiennes, des sommités reconnues… par Elisabeth Roudinesco elle-même16 ! Et pour ce qui est de dénoncer les travers de la psychanalyse reconnus et cités par Elisabeth Roudinesco dans la liste ci-dessus, on ne peut pas à la fois reprocher au Livre Noir de les décrire et regretter qu’ils ne les décrivent pas assez, ou pas sous la forme que souhaiterait Elisabeth Roudinesco ou avec d’éventuelles arrières-pensées qui ne seraient pas « les bonnes » (voir la section IV.4., L’Argument Tu quoque).

D’autre part, vu l’image très positive qui est (était ?) celle de la psychanalyse en France, le Livre Noir ne pouvait guère être reçu que comme une « dénonciation » ; si les faits contenus dans le Livre Noir ont été reçus comme tels dans un milieu peu habitué à la critique, le problème est lié au contexte. Dans des pays où tout ceci est connu depuis longtemps, les turpitudes de la psychanalyse17 sont vécues de façon dépassionnée.

Enfin, il est pour le moins piquant de voir Elisabeth Roudinesco regretter que les auteurs du Livre Noir ne consacrent qu’ « une ligne » aux « véritables années noires (collaboration [de psychanalystes] avec le nazisme ou les dictatures) ». Que n’aurait-elle dit s’ils y avaient consacré vingt pages ?

 

IV.7. Quand certains reprennent, sans les vérifier, les « informations » d’Elisabeth Roudinesco (ou l’effet « boule de neige »)
Effet Boule de neige : Untel déclare que Machin a dit que Chose avait appris chez Truc que… Témoignage de ènième main où chaque intermédiaire rajoute un élément de son cru à l’histoire de départ. À ceci s’ajoute ensuite la fallacieuse impression a posteriori d’un faisceau de sources convergentes.

Sur la quatrième de couverture de « Pourquoi tant de haine ? », on peut déjà repérer un magnifique effet « boule de neige », puisque Elisabeth Roudinesco cite un article de Jack Ralite et Jean-Pierre Sueur18 où ces derniers ne faisaient que reprendre les notes dites « de lecture » (voir plus haut)… d’Elisabeth Roudinesco et où l’on cherchait en vain la moindre critique de fond sur le Livre Noir de la Psychanalyse.

Mais l’effet « boule de neige » va surtout jouer à plein lorsque, ne connaissant le Livre Noir qu’à travers ce qu’en aura dit Elisabeth Roudinesco, beaucoup d’autres personnes colporteront les erreurs de cette dernière, le plus souvent en toute bonne foi, et se déclareront elles-mêmes blessées par son contenu.

C’est principalement pour cette raison qu’il m’apparaissait important de pointer un grand nombre de biais contenus dans ce livre qui se veut une réplique au Livre Noir de la Psychanalyse.

Je conclus en laissant la parole à Arthur Schopenhauer, l’auteur qui a le mieux parlé de l’effet « boule de neige » :

« Ce que l’on appelle l’opinion commune est, à y bien regarder, l’opinion de deux ou trois personnes ; et nous pourrions nous en convaincre si seulement nous observions comment naît une telle opinion. [Comme pour le ragot], nous verrions alors que ce sont deux ou trois personnes qui l’ont admise ou avancée ou affirmée, et qu’on a eu la bienveillance de croire qu’elles l’avaient examinée à fond ; préjugeant de la compétence suffisante de celles-ci, quelques autres se sont mises également à adopter cette opinion ; à leur tour, un grand nombre de personnes se sont fiées à ces dernières, leur paresse [ou séduction] les incitant à croire d’emblée les choses plutôt que de se donner le mal de les examiner. Ainsi s’est accru de jour en jour le nombre de ces adeptes paresseux et crédules [et séduits] ; car une fois que l’opinion eut pour elle un bon nombre de voix, les suivants ont pensé qu’elle n’avait pu les obtenir que grâce à la justesse de ses fondements. Les autres sont alors contraints de reconnaître ce qui était communément admis pour ne pas être considérés comme des esprits inquiets s’insurgeant contre des opinions universellement admises ou comme des impertinents se croyant plus malins que tout le monde. Adhérer devint alors un devoir. Désormais, le petit nombre de ceux qui sont capables de juger est obligé de se taire ; et ceux qui ont le droit de parler sont ceux qui sont absolument incapables de se forger une opinion et un jugement à eux, et qui ne sont donc que l’écho de l’opinion d’autrui. Ils en sont cependant des défenseurs d’autant plus ardents et plus intolérants. Car ce qu’ils détestent chez celui qui pense autrement, ce n’est pas tant l’opinion différente qu’il prône que l’outrecuidance qu’il y a à vouloir juger par soi-même – ce qu’ils ne font bien sûr jamais eux-mêmes, et dont ils ont conscience dans leur for intérieur. Bref, très peu de gens savent réfléchir, mais tous veulent avoir des opinions ; que leur reste-t-il d’autre que de les adopter telles que les autres les leur proposent au lieu de se les forger eux-mêmes? Puisqu’il en est ainsi, que vaut l’opinion de cent millions d’hommes? Autant que, par exemple, un fait historique attesté par cent historiens quand on prouve ensuite qu’ils ont tous copié les uns sur les autres et qu’il apparaît ainsi que tout repose sur les dires d’une seule personne. »

Arthur Schopenhauer, « L’art d’avoir toujours raison », 1830 (Mille et une nuits).

 

Jean-Louis Racca

 

Annexes

A. Les trois pétitions dont il est question dans le paragraphe 1.

On trouvera ici :

1) La pétition originale, envoyée aux organisateurs de l’exposition Freud par 42 chercheurs spécialisés dans l’étude de Freud et du freudisme.

2) La pétition initiée par Elisabeth Roudinesco, à la suite de la précédente.

3) La réponse que suscita cette deuxième pétition de la part des signataires de la première.

[Quelques clics de souris sur un bon moteur de recherches permettent de retrouver l’ensemble de ces textes, aller assez bas pour avoir la pétition originale et la « French petition ».]

 

A.1. La pétition originale, envoyée aux organisateurs de l’exposition par 42 chercheurs spécialisés dans l’étude de Freud et du freudisme, adressée le 31 juillet 1995 à Mr. James Hutson, directeur de la Division des Manuscrits à la Bibliothèque du Congrès
« We the undersigned have contributed in published writings to the historical scholarship and scholarly debate on Sigmund Freud’s life and work and the history and epistemological status of psychoanalysis. As scholars working independently of one another, with no common doctrinal commitment nor shared institutional affiliation, we are all of us concerned that the Freud Exhibition at the Library of Congress, scheduled for next year, should suitably portray the present status of knowledge and adequately reflect the full spectrum of informed opinion about the status of Freud’s contribution to intellectual history.

We therefore propose that Mr. Henry Cohen, a legislative attorney employed by the American Law Division of the Congressional Research Service at the Library of Congress, who in the past has earned the respect of several among us for his conversance, probity and impartiality in the domain of the contemporary discourse on Freud and psychoanalysis, be appointed to the Committee instituted for the realization of the projected exhibition in order to keep all of us apprised of the deliberations and developments and, if and whenever appropriate, to represent our collective interest and concerns. Mr. Cohen has himself consented to act on our behalf in just such a capacity, and so we ask, please, that you direct to him for further dissemination any response that you may have. Mr. Cohen can be addressed at: »

Traduction (par mes soins) : « Nous, soussignés, avons contribué dans des publications à la connaissance historique et au débat érudit à propos de la vie de Sigmund Freud, ainsi qu’au sujet du fonctionnement, de l’histoire et du statut épistémologique de la psychanalyse. En tant que spécialistes travaillant indépendamment les uns des autres, sans engagement doctrinal commun ni affiliation institutionnelle partagée, nous pensons tous que l’Exposition Freud à la Bibliothèque du Congrès, programmée pour l’année prochaine, devrait convenablement dépeindre l’état actuel de la connaissance et refléter de façon adéquate l’ensemble du spectre de l’opinion informée au sujet du statut de la contribution de Freud à l’histoire intellectuelle.

Nous proposons donc que M. Henry Cohen-un mandataire législatif employé par la Division de droit américain dépendant du Service de Recherches à la Bibliothèque du Congrès-qui a, par le passé, gagné le respect de plusieurs d’entre nous pour son érudition, sa probité et son impartialité dans le domaine du discours contemporain sur Freud et la psychanalyse, fasse partie du Comité institué pour la réalisation de l’Exposition en projet, afin de nous tenir tous informés des discussions et des développements et, chaque fois que cela s’avèrera nécessaire, pour représenter notre intérêt et soucis collectifs. M. Cohen a lui-même consenti à agir en notre nom en cette seule qualité, et ainsi nous demandons, s’il vous plait, que vous lui adressiez, pour plus ample diffusion, toute réponse que vous pourriez donner. M. Cohen peut être joint à : »

[Suivaient l’adresse et les noms des signataires.]

 

A.2. La pétition initiée par Elisabeth Roudinesco en réaction à la précédente.
« PÉTITION INTERNATIONALE, LANCÉE DE PARIS ET ADRESSÉE À MONSIEUR JAMES H. BILLINGTON, directeur de la LIBRARY OF CONGRESS de WASHINGTON. SIGNÉE PAR 180 PERSONNALITÉS DU MONDE INTELLECTUEL ENTRE LE 1er ET LE 25 MARS 1996.

En juillet 1995, vous avez reçu une pétition signée par 42 chercheurs indépendants, américains pour la plupart, et dont certains ont écrit des livres d’une violence inouie contre Sigmund Freud. Entraînés par ces extrémistes de l’antifreudisme, les signataires contestaient la validité de l’exposition sur le centenaire de la psychanalyse organisée par la Library of Congress pour l’automne 1996 sur le thème Freud, conflit et culture. Ils critiquaient le caractère trop « institutionnel » du catalogue prévu pour l’exposition et réclamaient que leurs propres travaux y figurent en bonne place. Forts de ces 42 signatures et de 9 autres supplémentaires, les responsables de cette pétition déclenchèrent aux États-Unis, pour appuyer leur démarche, une campagne de presse dans laquelle Freud était calomnié pour avoir commis de prétendus crimes, inventés en réalité de toutes pièces par des adeptes de la political correctness (pensée politiquement correcte), des neurobiologistes, des scientistes, des cognitivistes. Les uns l’accusaient d’avoir abusé sexuellement de sa belle-soeur et plus largement du corps des femmes et des enfants, et les autres d’avoir tout simplement inventé un nouveau charlatanisme incompatible avec la « vraie » science.
Devant la violence de cette chasse aux sorcières, vous avez pris la décision d’ajourner l’exposition, renonçant ainsi à exercer votre droit le plus fondamental : la liberté d’expression. En février 1996, après la réaction de nombreux journalistes et intellectuels américains et européens, hostiles à toutes ces manifestations puritaines où se mêlent un conservatisme et un radicalisme, vous avez changé d’avis et décidé que l’exposition aurait lieu à l’automne 1998. Nous tenons à vous dire que nous sommes inquiets de la tournure prise par les événements. Nous acceptons mal qu’une institution d’état aussi prestigieuse que la Library of Congress puisse se laisser manipuler par l’opinion publique et impressionner par la dictature de quelques intellectuels transformés en inquisiteurs. Nous vous demandons par la présente pétition, d’une part de veiller à ce que l’exposition ait lieu dans des conditions qui ne soient pas celles d’un chantage à la peur, et d’autre part de mettre en place une véritable ouverture des archives Freud à tous les chercheurs de toutes tendances et de tous pays, sans aucune discrimination, afin d’éviter que l’histoire du freudisme et de la psychanalyse ne devienne la propriété d’une pensée unique, tantôt orthodoxe, tantôt antifreudienne.

PARIS, le 25 mars 1996. »

 

A.3. La réponse que suscita la « french petition » de la part des signataires de la première ; elle date du 20 mai 1996.
Having been gravely implicated by a petition sent to the Library of Congress by the psychoanalyst Elisabeth Roudinesco and signed by 180 (mostly French) psychoanalysts and intellectuals (see below), we wish to reaffirm collectively, as signers of the petition sent in July 1995 to James Huston, Chief of the Manuscript Division at the Library of Congress, that we never called for the cancellation of the exhibition « Sigmund Freud: Conflict and Culture, » nor tried in any way to censor its content. Quite the contrary, as the text of our petition indicates, we asked that this exhibition be held in a spirit of free discussion and that it « suitably portray the present status of knowledge and adequately reflect the full spectrum of informed opinion about the status of Freud’s contribution to intellectual history. »

We are therefore pleased to learn that the Library of Congress has rescheduled this exhibition for Autumn 1998. We are also pleased that the exhibition’s curator, Michael S. Roth, has decided to enlist the help of some of us by asking Frank Cioffi and Oliver Sacks to contribute essays to the exhibition’s catalogue. We want to believe that he will take into account this time the profound changes that have affected Freudian historiography in the last twenty years, and we hope that he genuinely intends to use the advice and the suggestions that he solicited and received from several of us, both before and after the postponement of the exhibition by the Library of Congress.
In this light, we wholeheartedly join the signers of the French petition in calling for a real and total derestriction of the Freud archives deposited in the Library of Congress, and especially of the famous series ZR. Short of a lifting of this absurd embargo, which nothing can justify any more one hundred years after the beginnings of psychoanalysis, the Library of Congress’s stated intention of opening its collections to the public to « provide a context for Freud’s life and achievements » (Library of Congress Information Bulletin, June 13, 1994, p. 225) will remain an empty wish.
Having thus recalled the goals of the petition that we signed in 1995, we want to protest all the more vigorously against the tendentious and misleading way our action has been presented in several newspapers as well as in the French petition. We categorically reject, as several of us have already done on an individual basis, (Frederick Crews, letter to the New York Times, December 13, 1995; Mikkel Borch-Jacobsen, letter to the New York Times, December 23, 1995; Oliver Sacks, « Repenting at Leisure, » Psychiatric News, January 5, 1996; Adolf Grünbaum, « Freud, in Full View, » Pittsburgh Post-Gazette, January 7, 1996; Russel A. Powell, letter to the Toronto Globe and Mail, January 13, 1996; Peter J. Swales, quoted in Folha de SÃo Paulo, February 25, 1996) the charge of censorship brought against us in the U.S. and taken up by Elisabeth Roudinesco in the French media. As signers of the petition of July 1995, we refuse as well to identify ourselves as « anti-Freudian extremists » intent on charging Freud with « crimes » and « sexual abuse, » (Letter of petition sent by Elisabeth Roudinesco to James Billington, Librarian of Congress, on March 25, 1996; quoted in Libération, April 9, 1996) as advocates of political correctness, (Elisabeth Roudinesco, « Le révisionisme antifreudien gagne les Etats-Unis, » Libération, January 26, 1996, reprinted in Portuguese in Folha de SÃo Paulo, January 28, 1996, under the title « Is Freud Sexually Transmissible? »; Christian Delacampagne, « Freud censuré, » Le Monde, February 2, 1996; Nicolas Weill, « Contre-offensive freudienne, » Le Monde, April 12, 1996) as « ayatollahs » and as Nazis hunting down « Freudian Jews, » (Elisabeth Roudinesco, « Le révisionisme antifreudien gagne les Etats-Unis » ) or as allies of antisemitic « right wing religious fanatic[s] » (Sanford Gifford, « The Library of Congress and the Fear of Controversy, » The American Psychoanalyst. Quarterly Newsletter of the American Psychoanalytic Association 30/2, 1996.) The presence among our signers of several psychoanalysts, of Freud’s own granddaughter and of many Jews should be enough to refute these irresponsible slurs, whose only function is obviously to demonize the signers in the eyes of the public. As we explicitly wrote in our letter, we do not represent a coherent group, and we have signed this petition in our capacity « as scholars working independently of one another, with no common doctrinal commitment nor shared institutional affiliation. »

This campaign of denigration and disinformation is all the more troubling, because its main originators had first-hand knowledge of the text of our petition, as did the newspapers (notably French) that covered the story. In this respect, we protest against the de facto censorship exercised by these French newspapers, which, by refusing to publish the various rejoinders that were sent to them, took sides in the debate instead of providing their readers with the information they needed to form an opinion. We hope that the present statement will put an end once and for all to these baseless allegations, whose function is obviously one of diversion, and that our petition will finally be read for what it really is: not an enterprise of censorship, but, quite the opposite, a call for historical rigor, for non-doctrinaire scholarship and for institutional accountability. »

 

Traduction par mes soins : « Après avoir été gravement mis en cause par une pétition envoyée à la Bibliothèque du Congrès par la psychanalyste Elisabeth Roudinesco et signée par 180 psychanalystes et intellectuels (français pour la plupart) (voir ci-dessous, [sur le site où l’on peut trouver cette troisième pétition, la « french petition » se trouve effectivement au-dessous, à titre de rappel, NDLA]), nous souhaitons réaffirmer collectivement, comme signataires de la pétition envoyée en juillet 1995 à James Huston, chef de la Division des manuscrits à la Bibliothèque du Congrès, que nous n’avons jamais réclamée l’annulation de l’exposition « Sigmund Freud : conflit et culture », ni essayé de quelque façon que ce soit de censurer son contenu. Bien au contraire, comme l’indique le texte de notre pétition, nous avons demandé que cette exposition se tienne dans un esprit de libre discussion et qu’elle « dépeigne convenablement l’état actuel de la connaissance et reflète de façon adéquate l’ensemble du spectre de l’opinion informée au sujet du statut de la contribution de Freud à l’histoire intellectuelle. » Nous sommes donc heureux d’apprendre que la Bibliothèque du Congrès a reporté cette exposition à l’automne 1998. Nous apprécions également que le conservateur de l’exposition, Michael S. Roth, ait décidé de requérir l’aide de certains d’entre nous en demandant à Franck Cioffi et à Oliver Sacks de contribuer par des essais au catalogue de l’exposition. Nous voulons croire qu’il tiendra compte cette fois des changements profonds qui ont affecté l’historiographie freudienne au cours des vingt dernières années, et nous espérons qu’il a véritablement l’intention d’utiliser l’avis et les suggestions qu’il a sollicité et reçues de plusieurs d’entre nous, aussi bien avant qu’après l’ajournement de l’exposition par la Bibliothèque du Congrès.

De ce point de vue, nous nous associons de tout coeur aux signataires de la pétition française en réclamant une ouverture réelle et totale des archives de Freud déposées dans la Bibliothèque du Congrès, et particulièrement les célèbres séries ZR. Faute d’une levée de cet embargo absurde, que rien ne peut justifier plus de cent ans après les débuts de la psychanalyse, l’intention déclarée de la Bibliothèque du Congrès d’ouvrir ses collections au public pour « mettre la vie et les oeuvres de Freud dans leur contexte » (bulletin d’information de la Bibliothèque du Congrès, 13 juin 1994, p. 225) demeurera un voeu pieux.

Après avoir rappelé ainsi les buts de la pétition que nous avons signée en 1995, nous voulons protester plus vigoureusement contre la manière tendancieuse et fallacieuse dont notre action a été présentée dans plusieurs journaux aussi bien que dans la pétition française. Nous rejetons catégoriquement, comme plusieurs d’entre nous l’ont déjà fait à titre individuel, (Frederick Crews, lettre au New York Times, 13 décembre 1995 ; Mikkel Borch-Jacobsen, lettre au New York Times, 23 décembre 1995 ; Oliver Sacks, « Repentance à volonté », Nouvelles psychiatriques, 5 janvier 1996 ; Adolf Grünbaum, « Freud en pleine lumière », Post-Gazette de Pittsburgh, 7 janvier 1996 ; Russel A. Powell, lettre au Toronto Globe and Mail, 13 janvier 1996 ; Peter J. Swales, cité dans Folha de Sao Paulo, 25 février 1996) l’accusation de censure portée contre nous aux Etats-Unis et par Elisabeth Roudinesco dans les médias français. Comme signataires de la pétition de juillet 1995, nous refusons tout autant d’être catalogués « extrémistes anti-Freudiens » résolus à accuser Freud de « crimes » et d’« abus sexuel », (lettre de pétition envoyée par Elisabeth Roudinesco à James Billington, Bibliothécaire du Congrès, 25 mars 1996 ; cité dans Libération, 9 avril 1996) en tant qu’avocats du politiquement correct, (Elisabeth Roudinesco, « Le révisionisme antifreudien gagne les Etats-Unis », Libération, 26 janvier 1996, réimprimé en portugais dans le journal Folha de Sao Paulo, 28 janvier 1996, sous le titre « Freud est-il sexuellement transmissible ? » ; Christian Delacampagne, « Freud censuré », Le Monde, 2 février 1996 ; Nicolas Weill, « Contre-offensive freudienne », Le Monde, 12 avril 1996) en tant qu’« Ayatollahs » et comme Nazis chassant les « juifs freudiens », (Elisabeth Roudinesco, « Le révisionisme antifreudien gagne les Etats-Unis ») ou comme alliés des « fanatiques religieux de droite » antisémites (Sanford Gifford, « la Bibliothèque du Congrès et la crainte de la polémique », The American Psychoanalyst. Bulletin trimestriel de l’association psychanalytique américaine 30/2, 1996.) La présence parmi nos signataires de plusieurs psychanalystes, de la propre petite-fille de Freud et de beaucoup de juifs devrait suffire à réfuter ces insultes irresponsables, dont la seule fonction est évidemment de diaboliser les signataires aux yeux du public. Comme nous l’avons explicitement écrit dans notre lettre, nous ne représentons pas un groupe homogène, et nous avons signé cette pétition en qualité « de spécialistes travaillant indépendamment les uns des autres, sans engagement doctrinal commun ni affiliation institutionnelle partagée ». Cette campagne de dénigrement et de désinformation est plus que préoccupante, parce que ses principaux instigateurs ont eu la connaissance de première main du texte de notre pétition, de même que les journaux (notamment français) qui ont couvert l’histoire. À cet égard, nous protestons contre la censure de fait exercée par ces journaux français, qui, en refusant de publier les diverses répliques qui leur ont été envoyées, se sont montrés partisans au cours de la discussion au lieu de fournir à leurs lecteurs l’information nécessaire pour se former une opinion. Nous espérons que la présente déclaration mettra un terme une fois pour toutes à ces allégations sans fondement, dont la fonction n’est évidemment autre que la diversion, et que notre pétition sera finalement lue pour ce qu’elle est vraiment : pas une entreprise de censure, mais, tout à fait l’opposé, un appel pour la rigueur historique, la recherche non-doctrinaire [en français dans le texte, NDLA] et la responsabilité institutionnelle. »

 

B. Deux articles du Monde suite au « retrait » du rapport de l’INSERM (voir paragraphe 5), suivis de la lettre d’un lecteur.

B.1. Premier Point de vue : article de Christophe André

« L’affront à l’Inserm », par Christophe André, Le Monde, 11 février 2005

« Devant un parterre de psychanalystes, le ministre de la santé, Philippe Douste-Blazy, a triomphalement annoncé le 5 février qu’il avait fait retirer du site du ministère le rapport sur les psychothérapies de l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm), qui avait conclu à la maigre efficacité de la psychanalyse en tant qu’outil de soins. Et il s’est solennellement engagé à l’enterrer, promettant aux participants qu’ils « n’en entendraient plus parler ».
Il manquait juste une chose pour que la fête soit complète : que le rapport écrit soit brûlé sur la place publique. Mais peut-être le rusé ministre garde-t-il cette annonce dans sa manche pour un prochain colloque lacanien. Pour surprenante qu’elle soit, son attitude permet en tout cas de soulever plusieurs questions intéressantes. La première est de savoir comment, du moins dans un Etat démocratique moderne, un politique peut se permettre de décréter nul et non avenu un travail scientifique effectué par des experts indépendants (parmi lesquels figuraient des psychanalystes) au sein d’une institution publique (l’Inserm) ? La démarche la plus saine, si l’on contestait les conclusions du rapport, n’aurait-elle pas été de se placer sur le plan scientifique ?
En vérifiant, par exemple, si d’autres rapports semblables n’existaient pas à l’étranger, ce qui est le cas : depuis 1993, l’Organisation mondiale de la santé préconise le recours à des thérapies brèves et évaluées, comme les thérapies comportementales, pour la prise en charge de première ligne de nombreux troubles psychiques. Ou en demandant une contre argumentation étayée aux détracteurs du rapport de l’Inserm, qui ont jusqu’ici davantage eu recours aux menaces et à l’invective qu’aux études et à l’argumentation.
La médecine basée sur les preuves (Evidence Based Medicine) a pourtant permis de considérables progrès, en cancérologie, en infectiologie, en cardiologie notamment. Seule une partie de la psychiatrie la récuse encore, et seulement en France. Enterrons donc les rapports dérangeants, ce ne sera pas la première fois…
La seconde question est de savoir ce que pense réellement ce ministre des psychothérapies et de leur évaluation. Après tout, on pourrait comprendre que, sous le coup de l’émotion et de la pression du groupe devant lequel il parlait, il se soit assis sur la science pour défendre des convictions personnelles. Ce serait juste un abus de pouvoir ou une faiblesse. Mais la réalité est peut-être pire.
Car quelques mois auparavant, le 11 juin 2004, lors d’un congrès qui se tenait à Toulouse sous l’égide de l’Association française de thérapie comportementale et cognitive (AFTCC), le même ministre faisait un discours patelin et bienveillant soulignant le rôle important des comportementalistes dans les années à venir, en matière de santé mentale. Il est donc à craindre que M. Douste-Blazy soit plus proche de la démagogie et du clientélisme que de l’intime conviction, subjective ou scientifique.
Certes, le ministre a sans doute réalisé un bon calcul pour le court terme. En les brossant dans le sens du poil, il s’est acheté la bienveillance des plus médiatiques des psychanalystes, disposant de tribunes ouvertes dans la plupart des médias. Les psychothérapeutes comportementalistes, qui ont eu la naïveté de croire que le débat pouvait demeurer sur un plan scientifique, découvrent avec perplexité l’habileté politique de leurs adversaires, qui ont réussi dans la même année à faire modifier une loi de la République (la loi Accoyer sur le statut des thérapeutes, en 2004) et à pousser à la trappe le premier travail français de grande ampleur sur l’évaluation des psychothérapies.
On sait que la politique et la psychologie ont quelques points communs, dont celui-ci : dans ces deux pratiques, les erreurs d’aujourd’hui ne se paieront que demain. Mais qui paiera ? Les patients, qui continueront de ne pas être informés sur ce qui soigne ou pas en psychothérapie ? Les psychanalystes, dont certains finissent par oublier que, dans le métier de thérapeute, le résultat aussi est important, et non seulement la méthode ?
Ou le ministre, qui finira par ne plus pouvoir faire illusion sur son manque de courage ? Et de lucidité : car il semble avoir oublié que le rapport de l’Inserm a été demandé par les associations de patients.

Christophe André est médecin psychiatre à l’hôpital Sainte-Anne, à Paris. »

 

B.2. Second Point de vue : réponse d’Elisabeth Roudinesco

« La fin d’une évaluation », par Elisabeth Roudinesco, Le Monde, 15 février 2005.

« Dans un article récent (Le Monde du 11 février 2005), Christophe André s’en prend à Philippe Douste-Blazy. Il lui reproche d’avoir récusé publiquement la validité d’un rapport de l’Inserm sur l’évaluation des psychothérapies, rendu public le 26 février 2004, et qui avait suscité un véritable tollé chez tous les professionnels du soin psychique, du fait de ses incohérences et d’une orientation dénuée de toute objectivité scientifique. Selon l’auteur de cet article, le ministre de la santé aurait cédé au « clientélisme » et à « la démagogie » d’un groupe de psychanalystes fanatiques désireux que ledit rapport « soit brûlé sur la place publique ».
De tels propos sont intolérables. Car aucun de ceux qui étaient réunis à la Mutualité le 5 février, pour un forum portant sur le secret médical, n’a songé un instant à envoyer aux flammes le rapport de l’Inserm. Faut-il rappeler à M. Christophe André que si quelque chose a été « brûlé » dans l’histoire de la psychanalyse, ce sont les livres de Sigmund Freud, jetés au feu par les nazis ? Faut-il rappeler que le fondateur de la psychanalyse aurait été réduit en cendres dans un crématoire si Marie Bonaparte ne l’avait pas aidé à quitter Vienne ? Faut-il rappeler enfin que ses quatre soeurs – Rosa, Maria, Adolfine, Paula – périrent « brûlées » dans les ténèbres de la solution finale ? On peut donc se féliciter qu’un ministre de la République ait eu la dignité de rendre hommage à Freud et de se souvenir, au moment où l’on commémore la libération du camp d’Auschwitz, des persécutions dont il fut l’objet.
Loin d’être incendié, le rapport de l’Inserm a donc tout simplement été retiré du site du ministère de la santé, ce qui veut dire qu’il ne servira plus de référence à une prétendue évaluation de la souffrance psychique, fondée sur l’idée que l’être humain se réduirait à ses neurones ou à ses comportements, c’est-à-dire à quelque chose d’observable et de quantifiable. Car, par définition, le psychisme qui caractérise tout sujet échappe à de telles évaluations. Comment peut-on en effet mesurer ou expertiser l’angoisse, le désir, le sexe, l’intime, comme on décrirait un état pathologique lié à une maladie organique ? À vouloir médicaliser à outrance l’existence humaine, on tombe dans le ridicule comme le font certains comportementalistes qui prétendent guérir des phobies en trois semaines en obligeant un patient qui redoute les araignées à plonger sa main dans un bocal rempli d’inoffensives mygales ?
Pour bien comprendre la signification du bel hommage rendu à Freud par Philippe Douste-Blazy, il faut se rappeler qu’à la fin de l’année 2003 une bataille politique avait été engagée par le député Bernard Accoyer puis par Jean-François Mattéi, précédent ministre de la santé, en vue de faire voter une loi susceptible de définir le titre de psychothérapeute. Il n’en fallut pas plus pour créer un trouble immense au sein d’une communauté composée de 12 000 psychiatres, 25 000 psychologues, 5 000 psychanalystes et 7 000 psychothérapeutes qui se sentirent mécontents du sort qu’on leur réservait. Et ce d’autant plus qu’ils ont affaire – toutes tendances confondues – à la grande souffrance de millions de personnes atteintes à des degrés divers de névroses, de dépressions, de troubles mentaux, d’exclusion sociale ou de traumatismes multiples.
Votée en juillet 2004 par la majorité de droite, et malgré la forte mobilisation de la gauche unie, cette loi, qui s’appuyait en grande partie sur le rapport de l’Inserm, est aujourd’hui inapplicable. D’une part, parce que les articles qui la composent sont contradictoires, de l’autre, parce qu’elle ne permet en aucune façon, au cas où les décrets seraient rédigés, de définir le principe d’une psychopathologie clinique enseignable dans les départements de psychologie dépendant autant du ministère de la santé que de celui de l’éducation nationale.
Pour rétablir un équilibre entre les différentes pratiques et pour enfin commencer à penser la question du statut du psychisme dans la société démocratique moderne, sans la réduire ni à une causalité sociale ni à une détermination biologique, il est urgent de mettre en route, à droite comme à gauche, une nouvelle politique capable de répondre à de telles exigences.
Elisabeth Roudinesco est historienne de la psychanalyse. Elle collabore
au « Monde des livres ».

 

CE POINT DE VUE A SUSCITÉ LA RÉACTION D’UN LECTEUR, publié quelques jours plus tard (Le Monde, 19 février 2005) :

« Ainsi donc, si on lit bien Elisabeth Roudinesco, Auschwitz interdit de questionner l’efficacité thérapeutique de la psychanalyse (Le Monde du 15 février). Si un propos est  » intolérable « , c’est bien celui-là qui instrumente ainsi la tragédie. Pour avoir passé dix ans en analyse, je ne suis pas suspect de vouloir  » réduire en cendres  » Freud, mais je rougis de honte – avec lui sans doute – qu’on puisse défendre son oeuvre avec de tels arguments. Chez les freudiens aussi, l’inconscience a encore de beaux jours…
Dominique Monjardet »

 

 

Notes

1. Léon Brunschvicg : « Le progrès de la conscience dans la philosophie occidentale » (Alcan, Paris, 1927), p. 744.

2. Rappelons par exemple que l’article Psychanalyse du « Dictionnaire sceptique » de Robert Todd Caroll commence par « On considère Sigmund Freud comme le père de la psychanalyse qui pourrait être l’aïeule de toutes les psychothérapies pseudo-scientifiques […] ». Voir www.skepdic.com/psychoan.html.

3. Ceci est discuté y compris par certains psychanalystes. Ainsi André Green, ancien directeur de l’Institut de Psychanalyse de Paris, disait : « Elisabeth Roudinesco se dit historienne et psychanalyste. […] Je crains qu’elle ne soit pas plus psychanalyse qu’historienne. » (Le père omnipotent, magazine littéraire, 1993, 315, p. 22).

4. Les guillemets reflètent mes doutes quant à la justification de cette dénomination (pas innocente) car une « note pour information », datée du 13 août 2005, soit trois semaines avant la sortie (le 1er septembre 2005) du Livre noir de la psychanalyse, contient déjà toutes les données des « Notes de lecture », datées elles du 29 août. On peut s’interroger sur ce qu’Elisabeth Roudinesco pouvait alors savoir du contenu du livre qu’elle incitait à ne pas lire par différents moyens.

5. Cette mise au point venant du rédacteur en chef d’un hebdomadaire très vigilant en ce qui concerne l’antisémitisme suffit à réfuter cette accusation. On peut noter qu’Elisabeth Roudinesco est prompte à amalgamer « critique de Freud et de son oeuvre » et « antisémitisme ». Ce genre d’amalgame fait partie des effets de manipulation qu’on s’emploie à analyser ici. Se reporter à l’annexe B. pour une illustration de ce point.

6. Voir par exemple les archives en ligne du Nouvel Observateur, jeudi 22 septembre 2005.

7. Il s’agit d’un petit recueil, au moins par la taille (moins de 200 mots par page, contre plus de 400 en moyenne pour un livre de poche standard), écrit seulement à la proportion des deux tiers par Elisabeth Roudinesco elle-même.

8. L’un, de Ralite et Sueur, dans Le Monde du 9 septembre 2005, l’autre de Roland Gori dans L’Humanité
du même jour.

9. Dans le texte de sa pétition (voir annexe A), Elisabeth Roudinesco ne laissait alors pas du tout entendre que l’exposition envisagée était trop orthodoxe. Il me semble qu’elle devrait au minimum le préciser.

10. Voir par exemple [6], en particulier le chapitre 4 qui relate le manque d’empressement des héritiers de Freud à publier sa correspondance.

11. Voir par exemple [7], [8], [9] ou [10]. Et bien sûr les ouvrages d’Ellenberger : [11], [12] et [13].

12. Je remercie Mikkel Borch-Jacobsen pour ces précisions.

13. Si en France les termes révisionniste et négationniste sont à peu près synonymes, il n’en est pas de même dans le monde anglo-saxon ; le deuxième (denier), réservé à ceux qui nient l’Holocauste est, à justre titre, péjoratif, ce qui n’est pas le cas du premier (revisionist). C’est ce qu’explique par exemple Michael Shermer dans son livre Denying History (University of California Press, 2000, p. xv): « Les historiens devraient être considérés comme des révisionnistes. Celui qui veut obtenir un doctorat et devenir un historien professionnel doit écrire un travail inédit comportant une recherche basée sur des documents originaux et de nouvelles sources, réexaminant et réinterprétant un événement historique (en d’autres termes, révisant ce que l’on sait à propos de cet événement seulement). Ce qui ne veut pas dire qu’une révision est une fin en soi ; elle a lieu quand une nouvelle preuve ou de nouvelles interprétations la rendent nécessaire. » Ainsi Sulloway, l’un des plus célèbres « Freud scholars », s’est-il lui-même qualifié un temps de révisionniste.

14. Voir là aussi le point n° 17 de la liste Shermer.[3]

15. Ursula Gauthier est la journaliste qui a réalisé le dossier spécial « Livre Noir » du numéro du Nouvel Observateur du 1er septembre 2005. C’est elle en particulier qui a animé le débat entre un des auteurs, Jacques Van Rillaer, et Alain de Mijolla, historien de la psychanalyse.

16. On peut lire en effet, dans la note 18, au bas de la page 33 : « […] Mikkel Borsch-Jacobsen est l’un des historiens du courant révisionniste le (sic) plus intéressant et le plus doué […] ».

17. Pour une revue de presse internationale, voir cet exemple.

18. Le Monde, 9 septembre 2005.

 

Bibliographie

[1] MEYER C. (sous la direction de), « Le Livre noir de la psychanalyse », Paris, Les Arènes, 2005.

[2] BROCH H., « Les effets de la zététique ».

[3] SHERMER M., « How thinking goes wrong ».

[4] VAN RILLAER J., « Réponse du professeur Jacques Van Rillaer à Mme E. Roudinesco dans L’Express ».

[5] ROUDINESCO E., « Pourquoi tant de haine ? Anatomie du Livre Noir de la Psychanalyse », Navarin, 2005.

[6] BORCH-JACOBSEN M. et SHAMDASANI S., « Le dossier Freud, enquête sur l’histoire de la psychanalyse », Paris, Les Empêcheurs de penser en rond/Le Seuil, 2006.

[7] SULLOWAY F., « Freud Biologist of the Mind, Beyond the Psychoanalysis Legend », New York, Basic Books, 1979.

[8] OBHOLZER K., « Conversations avec l’Homme aux loups », trad., Paris, Gallimard, 1981.

[9] MAHONY P., « Freud and the Rat Man », Londres, Yale University Press, 1986.

[10] MAHONY P., « Dora s’en va. Violence dans la psychanalyse », trad., Paris, Les Empêcheurs de penser en rond/Le Seuil, 2001.

[11] ELLENBERGER H., « The discovery of the Unconscious, the History and Evolution of the Dynamic Psychiatry, New York, Basic Books, 1970.

[12] ELLENBERGER H., « À la découverte de l’inconscient. Histoire de la psychiatrie dynamique », trad., Villeurbanne, Simep, 1974.

[13] ELLENBERGER H., « Histoire de la découverte de l’inconscient », trad., Paris, Fayard, 1994.

[14] VAN RILLAER J., « Les Illusions de la psychanalyse », Belgique, Mardaga, 4e édition, 1996.

[15] VAN RILLAER J., « La gestion de soi », Belgique, Mardaga, 4e édition, 2000.

[16] VAN RILLAER J., « Psychologie de la vie quotidienne », Paris, Odile Jacob, 2003.

[17] INSERM, « Psychothérapies : trois approches évaluées », 2004.

Peut-on critiquer la psychanalyse ?