Écrit par Franck Villard
C’est une croyance très répandue parmi la population, mais aussi chez un certain nombre de professionnels de santé, en particulier les sages-femmes : il y aurait un effet de la lune sur les naissances, avec notamment plus d’accouchements les jours de pleine lune.
Une croyance qui trouve en partie son origine dans l’analogie faite entre le cycle lunaire (29 jours et demi environ) et le cycle menstruel féminin (27 jours en moyenne).
Le corps humain étant composé à 70% d’eau et l’influence gravitationnelle de la lune sur les marées étant avérée, des théories selon lesquelles la lune pourrait alors avoir un effet sur l’eau contenue dans le corps humain et notamment le liquide amniotique ont été proposées. La lune irait même jusqu’à provoquer la rupture de la poche des eaux. Étant donné le rapport entre notre masse et notre distance à la lune, cette théorie a été réfutée. En effet, la force gravitationnelle lunaire produit ses effets uniquement sur des objets dont la masse est très importante, comme les océans ou la croute terrestre, alors que cette force gravitationnelle lunaire est nulle sur des « objets » aussi minuscules que peuvent l’être les êtres humains.
Y a-t-il, malgré tout plus de naissances lors de la pleine lune ?
Des dizaines d’études scientifiques ont été menées pour répondre à la question de l’influence de la lune sur les naissances (beaucoup n’ont toutefois pas le niveau de rigueur requis pour une démarche scientifique), et la plupart d’entre elles ne mettent en évidence aucune corrélation significative entre les phases lunaires et les jours de naissance. Si certaines montrent un effet, celui-ci est si faible (moins de 1%), qu’il ne peut de toute façon pas être détectable pour un observateur local. De plus, on estime que beaucoup d’études ne reflétant aucune corrélation n’ont pas été publiées.
Comment expliquer alors que cette croyance soit si répandue chez les personnels des maternités ? Une partie de l’explication réside sans doute dans le fonctionnement particulier de notre cerveau, et dans ce que les psychologues appellent le « biais de confirmation d’hypothèses » : nous sommes ainsi faits que notre cerveau cherche toujours à confirmer nos croyances ou nos convictions. Ainsi, une sage femme qui croit en l’effet de la pleine lune aura tendance à aller plus souvent consulter le calendrier si la soirée a été chargée que si elle a été ordinaire. Elle adoptera ainsi un comportement visant à entretenir sa croyance en ne validant subjectivement que les informations qui vont dans son sens et en écartant celles qui pourraient la contredire. Au biais de confirmation s’ajoute une mémoire sélective : nous avons tendance à retenir les événements ne contredisant pas notre jugement. Si je suis convaincu du lien de cause à effet entre nombre d’accouchements et pleine lune, alors je vais retenir, parmi les naissances, celles qui se sont produites les jours de pleine lune… et « oublier » les autres.
Franck Villard
Pour aller plus loin :
Lire l’excellent livre de Jérôme Bellayer, « Sous l’emprise de la Lune. Le regard de la science » (Éditions book-e-book).